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Dans une tribune au « Monde », l’économiste Pierre Khalfa, répondant au professeur d’économie du droit Philippe Simonnot, défend le système par répartition qui fait que la retraite n’est pas seulement la « retraite pour les morts ».

Tribune. On aurait pu penser que le retour des crises financières, lié intrinsèquement au fonctionnement du capitalisme contemporain, aurait eu raison des zélateurs d’un régime de retraites par capitalisation. Ce n’est pas le cas. Au-delà du caractère anecdotique de la promotion d’un patron d’une filiale française d’un fond de pension américain au grade d’officier de la Légion d’honneur, le projet du gouvernement, qui fait suite à l’encouragement fiscal pour les divers plans épargne-retraite, limite maintenant la retraite par répartition à la part des salaires inférieurs à 10 000 euros.

Si cette mesure, qui va déjà entraîner un manque à gagner important en termes de cotisations sociales, ne concerne pour le moment qu’une petite minorité de salariés, on peut anticiper pour la suite une baisse de ce plafond faisant dépérir ainsi progressivement le régime par répartition au profit de la capitalisation.

Lecture biaisée

Ce retour de la capitalisation trouve ses idéologues pour le justifier. Ainsi le professeur d’économie du droit Philippe Simonnot, dans Le Monde du 3 janvier (« Le système par répartition, c’est la faute à Pétain »), s’y essaye en prenant appui sur l’histoire. Passons sur le fait qu’il croit stigmatiser la répartition en rappelant que le régime de Vichy avait mis en place une « allocation aux vieux travailleurs salariés » (AVTS) fonctionnant suivant un tel principe.

On sait, depuis le livre fondateur de Robert Paxton La France de Vichy (Seuil, 1972, seconde édition revue et augmentée, 1997) que ce régime ne regroupait pas seulement la fine fleur de l’extrême droite française mais aussi des éléments modernisateurs du capitalisme qui voyaient là une occasion de faire avancer leurs projets. Beaucoup d’entre eux se sont d’ailleurs par la suite retrouvés à Londres.

Au-delà, il tire son argument principal d’une lecture particulièrement biaisée des retraites ouvrières et paysannes (ROP) mises en place en 1910, modifiées légèrement par la suite, et dont il fait l’éloge. Les ROP étaient un régime en capitalisation dont le caractère obligatoire avait été supprimé par la Cour de cassation en 1911 et qui fixait l’âge de départ à la retraite à 65 ans avec par la suite une possibilité de la prendre à 60 ans. Rappelons que l’espérance de vie moyenne était à l’époque de 52 ans pour les femmes et de 49 ans pour les hommes. C’est ce qui faisait dire à beaucoup qu’il s’agissait d’une « retraite pour les morts ».


Lire la suite : « La retraite par répartition est l’expression de la solidarité intergénérationnelle sans laquelle aucune société ne peut survivre »


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Face aux difficultés de circulation, les universités s’organisent en reportant les examens, en tolérant les retards ou, même, en mettant un gymnase à disposition des étudiants qui voudraient y dormir.

La grève contre la réforme des retraites se répercute jusque sur les bancs des universités franciliennes. Plusieurs d’entre elles ont dû reporter, lundi 6 janvier, leurs partiels en raison des difficultés d’accès aux campus. A Sorbonne Université, des étudiants ont installé des barricades devant les sites Sorbonne, Michelet, Clignancourt et Malesherbes pour revendiquer le report des examens. « Lorsque l’accès à certains sites est bloqué par des étudiants et autres manifestants, les examens sont suspendus pour éviter tout risque de violence », a expliqué Sorbonne Université.

A Nanterre, un appel au blocage a été lancé, mais l’université assure que « tous les examens ont eu lieu lundi », même si « une trentaine d’étudiants sont passés dans un amphithéâtre pour essayer de mobiliser les étudiants, mais ça n’a pas pris ». Dans un tweet publié dimanche, le président de l’université, Jean-François Balaudé, a précisé que les partiels de décembre avaient déjà été déplacés et que l’université ne pouvait « faire davantage, sauf à rallonger l’année universitaire, ce dont personne ne veut ».

Il a néanmoins tenté de rassurer ses étudiants en promettant la tolérance face aux retards et absences. Des mesures exceptionnelles ont aussi été prises comme l’ouverture du gymnase « à compter de lundi soir, pour permettre aux étudiant·e·s qui le souhaitent d’y dormir », a-t-il ajouté. Lundi midi, une assemblée générale regroupant environ 300 personnes a voté le blocage de la fac à partir du lendemain.

Des reports parfois anticipés

Certaines universités parisiennes, dont l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, avaient anticipé les difficultés liées à la grève et annoncé un report des examens qui devaient débuter dès ce lundi. « Les 45 000 étudiants passeront leurs examens en bonne et due forme à partir du lundi 13 janvier et ils seront étalés sur trois semaines », a déclaré à l’Agence France-Presse le président de cette université, Georges Haddad.

A Bordeaux, les partiels sont reportés en psychologie, sociologie, anthropologie et sciences de l’éducation sur le campus Victoire en raison de « dégradations commises pendant l’occupation d’une partie des bâtiments par des étudiants en décembre », a fait savoir sa présidence.

A Amiens, le président de l’université de Picardie Jules-Verne a décidé, lundi soir, d’annuler « l’ensemble des épreuves d’examen [hors concours] » organisées jeudi et de les reporter. Ce report concerne les étudiants de tous les sites de l’université (Amiens, Beauvais, Creil, Laon, Soissons, Saint-Quentin), a annoncé l’université, sans préciser le nombre d’étudiants qui devront donc passer leurs examens à une autre date.


Lire la suite : La grève pousse plusieurs universités à reporter les partiels


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Sous pression depuis le 5 décembre et alors que les discussions sur la réforme reprennent mardi, le chef de l’Etat a prévu, en janvier, de mettre l’accent sur l’écologie et la lutte contre le communautarisme.

Emmanuel Macron, qui pratique le noble art une fois par semaine, le sait bien : rien de pire pour un boxeur que de se faire bloquer dans un coin du ring, à encaisser les coups sans pouvoir se dégager. Sous pression depuis le 5 décembre et la première journée de mobilisation contre la réforme des retraites,et alors que le conseil des ministres de rentrée doit se tenir lundi 6 janvier,le chef de l’Etat entend se donner de l’air. « Le président ne veut pas se laisser enfermer », confie son entourage.

La consigne a été donnée avant les vacances de Noël : pas question de passer le mois de janvier à vivre au rythme des négociations sur la réforme, qui doivent reprendre mardi au ministère du travail, sous la houlette du premier ministre, Edouard Philippe. Malgré la volonté d’« aller vite » affichée par le gouvernement, les discussions avec les syndicats pourraient en effet durer encore plusieurs semaines, la présentation du projet de loi en conseil des ministres étant prévue le 24 janvier et son examen au Parlement fin février.

Virage écologique

Décidé à donner une coloration verte à la seconde partie de son mandat, Emmanuel Macron devrait commencer par se rendre au Conseil économique, social et environnemental (CESE), le 10 janvier, pour participer à la quatrième session de travail de la Convention citoyenne pour le climat, créée à l’issue du grand débat pour formuler des propositions en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

L’occasion, pour le locataire de l’Elysée, de donner de la consistance à son virage écologique, un an et demi après la démission de Nicolas Hulot. « 2020 sera (…) l’année où un nouveau modèle écologique doit se déployer », a promis M. Macron lors de ses vœux aux Français, le 31 décembre, disant « attend[re] beaucoup des propositions que préparent 150 de nos compatriotes qui se sont engagés dans la convention citoyenne et travaillent depuis plusieurs semaines d’arrache-pied ».

Lors de cette visite, le président sera « auditionné » par les membres de la convention. « Il répondra à toutes les questions qu’on lui posera, ce sera une sorte de grand oral », promet-on à l’Elysée. M. Macron devrait retourner au CESE en avril, lorsque les propositions de l’Assemblée seront formulées. Un exercice qui n’est d’ailleurs pas sans risque pour l’exécutif, puisque le chef de l’Etat s’est engagé à reprendre les propositions de la convention ou à les soumettre à référendum.


Lire la suite : Réforme des retraites : Emmanuel Macron compte se tenir à distance des négociations


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Depuis le 5 décembre, les danseurs de l’institution demandent le maintien de leur régime spécial de retraite, lié à la pénibilité du métier. Ils refusent jusqu’à présent les propositions du gouvernement.

Les images de la performance se sont répandues sur les réseaux sociaux et les télévisions, produisant un double effet d’émerveillement et de respect. Mardi 24 décembre, à 15 heures, sur le parvis du Palais Garnier, une quarantaine de danseuses du Ballet de l’Opéra national de Paris, épaulées par quelque 75 musiciens de l’institution, ont offert au public vingt minutes du Lac des cygnes, de Tchaïkovski. Les danseurs formaient un cordon autour de leurs collègues féminines pour cette opération qui a rassemblé environ 110 danseurs sur les 154 que compte la compagnie parisienne et s’inscrit, selon le communiqué envoyé aux médias le 23 décembre, « dans la continuité du mouvement contestataire contre le projet de réforme du gouvernement ».Deux banderoles étaient déployées sur le parvis : « Opéra de Paris grève » et « La culture en danger ».

Ce happening relançait la grève entamée le 5 décembre par les danseurs, mais aussi par les musiciens, les chanteurs et les techniciens de l’Opéra national de Paris pour sauvegarder le régime spécial de retraite mis en place en 1698 par Louis XIV. Au sein des manifestations qui ont scandé le mois de décembre, des étoiles comme Germain Louvet, Mathieu Ganio et Amandine Albisson, ainsi que des membres du corps de ballet.

Reconduite chaque jour, à l’issue de prises de décision des différentes corporations concernées par les productions du soir, la grève, qui aura entraîné d’ici au 31 décembre entre 10 et 12 millions d’euros de pertes de recettes de billetterie selon la communication de l’Opéra national de Paris, a conduit à l’annulation, à la date du 27 décembre inclus, de 55 représentations, dont celles des ballets Raymonda et Le Parc,ainsi que celles de l’opéra Le Prince Igor.

« Notre corps est notre outil de travail »

« C’est incroyable comme ce mouvement fédère la compagnie en dehors de toute hiérarchie,s’exclame Alexandre Carniato, danseur, délégué syndical CGT et élu à la caisse des retraites. Il est rare aussi que l’ensemble de la maison s’unisse derrière une cause commune pour la préservation de l’institutiocn. Par ailleurs, il est vraiment surprenant que des danseurs manifestent. On a toujours peur de se blesser car notre corps est notre outil de travail. »

Alexandre Carniato, délégué syndical CGT : « On ne veut pas être ceux qui vont jeter 350 ans d’histoire de la danse classique à la poubelle en disant “après moi, le déluge !” »


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