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Dans la série « Deadloch », le rire en étendard face aux violences de genre

Une écriture féminine pour dénoncer les violences de genre.
Nicole Bastin, Université Rennes 2

La scène d’ouverture donne le ton. Dans une ville fictive de la côte tasmanienne (Australie), deux jeunes aborigènes rentrent, insouciantes, au petit matin, traversant des espaces déserts et embrumés. Comme dans toute série policière qui se respecte, on s’attend à ce qu’elles soient attaquées, sinon qu’elles découvrent le cadavre d’une femme horriblement violentée. Mais contre toute attente, elles tombent plutôt sur le corps sans vie d’un homme nu. Littéralement même, puisqu’en trébuchant dessus, l’une d’elles fait tomber son joint, qui se ravive alors au contact des poils du pubis. Et l’adolescente, paniquée, de pousser un juron, tout en frappant énergiquement le sexe pour éteindre son mégot.

« Parodie satirique », selon les termes de la professeure de littérature Linda Hutcheon, Deadloch, la série créée par le duo de comiques australiennes Kate McLennan et Kate McCartney, est autant un réquisitoire contre la « masculinité hégémonique » qu’un plaidoyer en faveur des victimes de discrimination. En usant du rire pour dénoncer des violences structurelles, la série se positionne en tête d’un courant d’expression féministe, récent mais affirmé.

Une satire sociale

À la façon des Caractères de la Bruyère, dans Deadloch, chaque personnage correspond à un archétype et incarne de façon exagérée un trait de personnalité, associé à une tendance de la société occidentale. Ce principe permet à la série de brosser avec humour le portrait de nombreux personnages, parmi lesquels des « gentils », comme une vétérinaire écolo persécutant son entourage avec des règles de bienveillance, une footballeuse tenace en quête désespérée de coéquipières ou un agent de police adorablement tire-au-flanc. Du côté des « vilains », on retrouve toute une gamme de misogynes – du paternaliste arrogant au pervers harceleur, en passant par des sexistes ouvertement hostiles et insultants – ainsi que deux femmes : une héritière raciste condescendante, et la belle idiote du village, intolérante essentiellement par stupidité : « la schtroumpfette » selon le concept de l’autrice féministe américaine Katha Pollitt, qui sert autant d’alibi aux hommes masculinistes qu’elle est abusée et manipulée par eux.

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Auparavant entièrement contrôlée par des hommes blancs et discriminants, la ville de Deadloch s’est tournée vers l’art et la culture, à la faveur de quelques décès opportuns mais aussi sous l’impulsion d’une maire de couleur, stressée et stressante. La commune est alors devenue miraculeusement un havre de paix pour des couples de lesbiennes, qui sont maintenant beaucoup plus nombreuses ou visibles qu’avant, à commencer par la shérif Dulcie.

C’est dans ce contexte qu’une série de meurtres fait paraître, aux abords de la ville, des cadavres d’hommes dénudés, dont on a également sectionné la langue, toute référence au mythe grec de Philomèle étant évidemment purement volontaire.

L’enquête se retrouve alors aux mains de Dulcie mais aussi d’Eddie, une détective impulsive, vulgaire et borderline homophobe, dépêchée en renfort. Les tensions très fortes qui émergent, à la fois entre Dulcie et Eddie et entre le duo d’enquêtrices et le reste de la population s’entremêlent avec la poursuite d’un, ou d’une serial killer, dont le mobile se révèle être lié à la question des violences de genre, les victimes en ayant toutes commis de leur vivant.

Naturellement, comprenant qu’ils sont visés par ce qu’ils pensent être une tueuse en série et supportant très mal leur soudaine position de cible vivante, les machos de la ville tentent de s’organiser pour reprendre la situation en main. Ainsi, dans Deadloch, les comiques de caractère, de mœurs et de situation permettent-ils la peinture contrastée d’un monde inégalitaire et absurde, au bord de l’implosion, une représentation encore rehaussée par une utilisation prononcée du vrai.

La vérité comme ressort comique

À maintes reprises, et de façon toujours inattendue, dans la série, les personnages énoncent la vérité, tout du moins leur vérité, que ce soit lors d’un banquet gastronomique, d’un dîner d’anniversaire, d’un interrogatoire de témoin, ou pendant une garde à vue collective. En plus de déclencher le rire, cette authenticité imprévue permet aux autrices de verbaliser, via leurs personnages, un nombre important de phénomènes sociaux et historiques : par exemple, le stigmate social dû à la non-conformité aux stéréotypes de genre, l’éviction des aborigènes de leurs terres lors de la colonisation anglaise ou encore la condamnation de l’homosexualité par l’Église. Typiquement, à la shérif qui lui demande pourquoi elle a arrêté de se rendre à la paroisse, Skye, la chef cuisinière, répond : « Comme toi, Dulcie, je suis devenue trop gay pour ça. »

Cette franchise à portée pédagogique s’accompagne de plus d’un langage grossier, imagé et tellement outrancier que les scénaristes ont dû le défendre auprès de la direction d’Amazon, qui diffuse la série. Dans un essai argumenté, surnommé The Cunt Manifesto (littéralement Le Manifeste de la Chatte), les deux Kate, McLennan et McCartney, ont argué autant d’une exception culturelle australienne que d’une écriture de l’insulte typiquement shakespearienne. Leur démarche est d’autant plus originale que c’est justement au nom de la bienséance que les femmes ont été pendant des siècles exclues du cercle des comiques professionnels, comme l’explique l’historienne Sabine Melchior-Bonnet dans son livre Le Rire des femmes, une histoire de pouvoir.

Par ailleurs, en observant d’autres œuvres comiques de la décennie passée, on constate que Deadloch partage avec certaines d’entre elles une écriture exclusivement féminine, une grande liberté de ton et l’exposition truculente de violences de genre.

Deadloch, série phare d’une contre-offensive féminine par le rire

En effet, comme

, série inconnue en France mais qui a lancé en 2016 la carrière de l’autrice-réalisatrice américaine Jennifer Kaytin Robinson, Deadloch met en lumière l’importance de la sororité face à l’impunité masculine, et ce, malgré la difficulté reconnue de maintenir une cohésion féminine. Comme le film
d’Emerald Fennell, couronnée de l’Oscar du meilleur scénario en 2021, Deadloch malmène la figure de l’allié apparent, de l’homme en apparence « sympa », mais qui, sous des dehors amènes, ne sert en réalité que des intérêts égoïstes et malsains. Comme dans le final de I May Destroy you, la série en partie autobiographique de Michaela Coel, on ne sait plus si l’on doit rire de l’homme violent, violenté à son tour, ou au contraire le plaindre, voire le consoler.

Auparavant, d’autres séries avaient déjà fait usage d’éléments de comédie, tout en dissertant sur le « continuum des violences faites aux femmes », théorisé par la sociologue britannique Liz Kelly. Citons en particulier la première saison de

en 2015, la série
et la troisième saison de Broadchurch en 2017. Néanmoins, dans ces œuvres, qui n’étaient pas toutes écrites par des femmes, le rire venait surtout en réconfort, ponctuer un récit dramatique de respirations comiques.

Au contraire, dans Deadloch, I May Destroy You ou Promising Young Woman, loin d’être un baume, le rire a du piquant et provoque d’amères prises de conscience. Non seulement rire et violences y sont indissociables, mais les tensions soulevées par l’humour restent en suspens. Alors qu’une plaisanterie consiste logiquement en l’articulation de deux temps, la création d’une tension que l’on vient ensuite soulager par une punchline, dans Deadloch – exactement comme le préconisait Hannah Gadsby, la comique d’origine tasmanienne, dans son spectacle

– la tension se maintient du côté des hommes. Réduits au silence ou exposés à la risée du public, machistes et misogynes terminent les véritables dindons de la farce, un procédé que l’on retrouve dans Sweet/Vicious, dans Promising Young Woman ou dernièrement aussi dans la démarche de l’humoriste belge Laura Laune. Celle-ci a en effet lancé Trashh, une
recyclant des commentaires haineux reçus par elle-même et par d’autres femmes. Retournant notamment l’insulte sexiste la plus communément adressée en ligne, l’humoriste arbore, en couverture de son site, un t-shirt sur lequel on peut lire “Salut les fils de pute”. En rassemblant par connivence les personnes insultées et discriminées, le rire participe ici d’une contre-offensive féminine, voire d’une écriture post-traumatique collective.

Une vision complexe des rapports de domination

En tant que production emblématique d’une mouvance récente, Deadloch est donc autant une validation qu’un démenti des écrits de Virginia Woolf. D’un côté, la série est écrite et réalisée par des femmes qui cherchent clairement « à modifier les valeurs établies, à rendre sérieux ce qui paraît insignifiant à un homme, et insignifiant ce qui est, pour lui, important », comme le disait l’autrice aux étudiantes de Cambridge en 1928. Mais quelques années plus tard, Woolf écrivait aussi dans son journal : « plus une vision est complexe et moins elle se prête à la satire ». Or Deadloch offre justement, via la satire, une vision complexe des rapports de domination et de la façon dont ceux-ci peuvent gangrener le tissu d’une communauté.

De fait, puisqu’on ne peut rire de quelque chose sans présupposer de son existence, comme l’expliquait le critique littéraire Michael Riffaterre, l’humour, surtout s’il est moqueur, est un puissant moyen de générer une vérité, de dessiner les contours d’un fait social, selon la terminologie d’Émile Durkheim. C’est pourquoi Deadloch donne finalement raison à l’historien Alain Vaillant, pour qui, « il faut parfois du sérieux, ne serait-ce que pour redonner au rire sa vraie mission anthropologique, qui est de mettre le réel à distance. Mais pour mieux le voir ».

Nicole Bastin, Enseignante en études sur le genre, doctorante en études culturelles anglophones, Université Rennes 2

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Applications de rencontres : comment en faire bon usage

Alisa Minina Jeunemaître, EM Lyon Business School; Jamie Smith, ISC Paris Business School et Stefania Masè, IPAG Business School

Les rencontres amoureuses peuvent s’accompagner de nouveaux défis, et sont parfois source de frustration. Par le passé, les relations étaient souvent arrangées par les familles et guidées par les normes sociétales, ce qui limitait les options mais nous épargnait le supplice lié à la nécessité de faire des choix. Aujourd’hui, les célibataires ont à leur disposition une infinité de partenaires potentiels. Une étude réalisée en 2019 par le Pew Research Center a montré que les couples qui se sont rencontrés en ligne sont plus diversifiés, que ce soit en termes de revenus, d’éducation, d’orientation politique ou d’appartenance ethnique.

Le coût de la liberté

Selon le psychanalyste Erich Fromm, la liberté peut parfois susciter un sentiment d’impuissance, voire d’isolement. Notre équipe de chercheurs en marketing explore le monde des rencontres en ligne pour déterminer dans quelle mesure le marché des rencontres amoureuses, qui s’appuie sur des principes de liberté et de choix infinis, s’étend à tous les aspects de la vie humaine. Nos recherches révèlent que les sentiments d’anxiété et de frustration des utilisateurs découlent d’un conflit entre la perception de la marchandisation des relations et les valeurs sociétales.

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Certains participants à l’étude ont qualifié les rencontres en ligne d’« épuisantes », exprimant l’espoir de pouvoir « enfin » terminer le processus. Didier, un ingénieur de 51 ans vivant à Paris, qualifie les rencontres en ligne de « manipulation de masse » ; Ella, une rédactrice de 25 ans, déclare qu’au début, les rencontres en ligne étaient « excitantes et nouvelles », mais qu’au fil du temps, elle a trouvé l’expérience déprimante.

Alors pourquoi, face aux promesses d’options amoureuses illimitées, avons-nous parfois l’impression que l’amour a tendance à s’éloigner ?

La modernité « liquide » et la montée du capitalisme émotionnel

Dans son livre L’amour liquide, le sociologue britannique Zygmunt Bauman affirme que le monde moderne a inauguré l’ère de « l’individu sans attaches », qui privilégie la liberté et la flexibilité à l’attachement. Cela a transformé les notions traditionnelles d’amour et de relations en des formes plus éphémères et « liquides ».

La sociologue franco-israélienne Eva Illouz fait écho à ces observations, affirmant que nos sociétés capitalistes d’aujourd’hui sont confrontées à de nouveaux défis en raison de l’évolution des normes et des valeurs. Certes, nous avons désormais un plus grand contrôle de nos vies amoureuses et nous pouvons aspirer à une plus grande égalité entre les sexes. Mais les injonctions sociales continuent de véhiculer des normes irréalistes en matière d’amour, ce qui n’encourage pas à s’investir dans le travail émotionnel nécessaire à l’établissement de liens plus profonds.

Des valeurs mal alignées

Dans le cadre des rencontres en ligne, que se passe-t-il lorsque les valeurs ou les attentes de deux personnes en matière de relations amoureuses ne sont pas les mêmes ? Comme le montre notre étude, ces décalages peut être source de frustration. Par exemple, un participant peut être à la recherche d’une relation à long terme, tandis qu’un autre est plus intéressé par des relations occasionnelles ou par l’élargissement de ses horizons. Tous deux perçoivent alors les actions de l’autre comme inappropriées.

Mark, un consultant en gestion de 26 ans, fait part de son sentiment de frustration lorsque les femmes qu’il a rencontrées sur une application voulaient se connecter avec lui sur les médias sociaux ou l’appeler fréquemment, car il préférait établir des limites. En revanche, Alice, une administratrice de 54 ans, déclare que certains des hommes qu’elle a rencontrés en ligne n’étaient souvent pas clairs quant à leur état civil. Elle a même mis au point des techniques pour savoir si un partenaire potentiel était en couple, par exemple s’il raccrochait le téléphone très rapidement ou payait toujours en liquide.

Il arrive même que ces désirs contradictoires traversent une seule et même personne : elle peut aspirer à l’engagement, à la confiance et à la proximité, tout en ne voulant pas ou en ne pouvant pas renoncer au choix illimité de partenaires. Derek, un entrepreneur de 38 ans, a réfléchi à l’écart entre ses attentes en matière de relations et son expérience des rencontres en ligne :

« Pour moi, les relations à long terme sont une question de valeurs – de valeurs humaines. Mais si j’ai un rendez-vous et que le lendemain matin, avec un nouveau profil, je me dis “Oh, super”, et la personne que j’ai vu hier soir se retrouve en bas de la liste. »

Ce décalage peut conduire à des expériences négatives, à de mauvais traitements, voire à des abus en ligne. Rose, maître de conférences de 23 ans, déclare que les rendez-vous galants lui font peur en raison des « histoires horribles » qu’elle a entendues. En effet, les récits d’autres participants à l’étude (dont nous avons choisi de taire les noms) font état d’expériences allant de la détresse au traumatisme, y compris des agressions verbales, des rencontres avec des personnes qui ne ressemblent pas du tout à leur photo, et même une agression sexuelle commise par une personne utilisant un faux profil.

La gamification des rencontres

Le cadre social désinstitutionnalisé des rencontres en ligne peut conduire à des situations où il n’y a parfois que peu ou pas de liens sociaux partagé entre les partenaires. Les personnes rencontrées en ligne sont perçues comme moins « réelles » que celles rencontrées par l’intermédiaire d’amis ou de membres de la famille. Ce rapport déformé de la réalité peut rendre les comportements moins prévisibles, car il n’y a pas de sanctions spécifiques pour ce qui serait normalement considéré comme un comportement contraire à l’éthique.

Si de nombreux participants à l’étude apprécient le choix offert par les applications de rencontres, certains hésitent à dire qu’ils les utilisent – ou prétendent qu’ils n’y ont recours que de manière exceptionnelle. La peur du jugement social est encore très présente : certaines personnes se disent que si elles trouvent un partenaire de cette manière, les membres de leur cercle social se diront qu’il s’agit d’un échec, parce qu’elles n’ont pas réussi à trouver un partenaire dans la « vraie vie » par des moyens traditionnels.

L’incertitude survient lorsque nous ne sommes pas sûrs des codes en vigueur et des résultats de nos interactions sociales. Cela peut se produire lorsque le cadre dans lequel se déroule l’interaction n’est pas bien défini. Comme les termes de la relation ne sont pas clarifiés, les deux parties se sentent vulnérables et préfèrent ne pas trop s’ouvrir pour éviter d’être potentiellement blessées. Les codes de communication sont également souvent peu clairs, ce qui donne lieu à de multiples discussions dans les communautés en ligne, où les utilisateurs demandent des conseils pour expliquer les comportements de leurs partenaires.

Quelques stratégies de survie

  • Choisissez l’authenticité.

Si vous utilisez une application de rencontre, envisagez une stratégie audacieuse : l’authenticité. L’autopromotion, c’est bien, c’est même nécessaire, mais la conviction, le réalisme et l’honnêteté le sont tout autant. De cette façon, vous pouvez essayer de rencontrer des partenaires qui vous voient comme la personne que vous êtes et non comme celle que vous projetez. Choisissez des photos flatteuses et mettez en valeur vos traits de caractère, mais montrez aussi vos convictions et votre vraie personnalité.

  • Utilisez les fonctions de l’application pour affiner votre choix

Lorsque vous cherchez une relation en ligne, il est important de tirer le meilleur parti des ressources disponibles, afin de ne pas passer à côté de connexions potentielles. Pensez à utiliser des filtres et des outils de recherche pour affiner votre recherche de partenaires compatibles. Précisez vos préférences, telles que l’âge, le lieu de résidence et les centres d’intérêt communs, afin d’augmenter vos chances de trouver une relation sérieuse.

  • Appréciez les petites choses

Il est essentiel d’adapter votre approche et de redéfinir ce qui a de la valeur dans ce contexte unique. Au lieu de juger le succès à l’aune d’un seul critère, envisagez de le redéfinir pour y inclure d’autres aspects – par exemple, des conversations enrichissantes ou des intérêts partagés. Cette flexibilité vous permettra de recalibrer vos attentes et de découvrir la valeur de votre expérience de l’application, même si elle ne correspond pas à vos objectifs initiaux. L’amour se construit sur des émotions partagées.

  • Parlez, mais écoutez aussi

N’ayez pas peur de discuter de vos attentes avec des partenaires potentiels. Plus important encore, lorsqu’une personne dit qu’elle ne cherche pas une relation sérieuse, croyez-la, plutôt que d’essayer de la changer ou d’espérer qu’elle revienne sur sa décision. Montrez-lui que vous l’écoutez et que vous ne vous contentez pas d’émettre des idées préconçues.

  • Continuez à explorer, mais sachez quand vous arrêter

Enfin, n’abandonnez pas. Les rencontres en ligne étant de mieux en mieux acceptées, un nombre croissant de personnes trouvent de vraies relations en ligne. Malgré tous les obstacles, plus de 12 % des mariages commencent en ligne, selon une étude du Pew Research Center. Considérez les applications de rencontres non pas comme une recherche sans fin, mais comme un moyen de parvenir à une fin – et potentiellement à une fin heureuse.

Alisa Minina Jeunemaître, Associate Professor of Marketing, EM Lyon Business School; Jamie Smith, Director of Undergraduate Programmes, ISC Paris Business School et Stefania Masè, Associate professor of marketing and communication, IPAG Business School

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Entre les Français et les tatouages en anglais, une véritable love story

Les messages en anglais, un classique du tatouage.
Jeni Peake, Université de Bordeaux

J’étudie les tatouages en France depuis 2019 – c’est l’un des grands thèmes de ma thèse de doctorat en études anglophones – et comme l’anglais est ma langue maternelle, je passe mes journées à observer la peau des Français autour de moi, cherchant les mots encrés sur leur corps. Selon le reporter Aurélien Colly, dans un podcast de Radio France, en 2010, 10 % des Français étaient tatoués ; ils étaient 18 % en 2018, et sont désormais 20 %.

Les tatouages peuvent être considérés comme une forme de mode, et comme pour les modes vestimentaires, certaines tendances vont et viennent. Alors que les lettrages tendance ont longtemps été dominés par les écritures asiatiques, j’avance l’idée qu’aujourd’hui, ils sont détrônés par les tatouages en anglais. On pourrait y voir la simple continuité de l’histoire d’amour historique et culturelle entre le monde anglophone et la France.

Pour les besoins de ma thèse, j’ai publié un sondage sur les réseaux sociaux, auquel 1452 Français ont répondu ; 602 personnes ont indiqué qu’elles avaient choisi un mot, une phrase ou plusieurs pour leurs tatouages ; ces tatouages s’impriment sur les corps en plus de 19 langues, y compris l’anglais (en tout, 826 tatouages de lettrage figurent dans l’étude).

Raconter sa vie

Les tatouages qui contiennent un lettrage peuvent être considérés comme des « caractères biographiques » racontant la vie, les avis, et les sentiments des porteurs. Par exemple, selon une étude menée en 2019, des femmes atteintes du cancer du sein ou de l’endométriose portent des tatouages pour deux raisons : pour se situer dans la communauté des femmes atteintes d’une de ces maladies et pour représenter leur lutte contre la maladie ou la souffrance qu’elle engendre. Pour établir les thèmes présentes dans cette étude, nous avons suivi les méthodes de la théorie ancrée (grounded theory) qui consiste à partir d’une collecte de données pour mettre en lumière les processus sociaux sous-jacents à l’expérience subjective, aux trajectoires et aux pratiques des personnes étudiées. Grâce aux données récoltées, j’ai pu identifier des thèmes récurrents.

Les chansons comme source d’inspiration

Le thème le plus courant fait référence à la culture populaire anglophone et principalement à des paroles de chansons en anglais. Cela n’est pas surprenant : selon le ministère de la Culture, 83 % des Français écoutent de la musique dans une langue autre que le français, cela malgré les tentatives de la loi Toubon, votée en 1994 puis modifiée en 2016, pour encourager les Français à écouter de la musique française.

Les 98 tatouages liés à la musique dénotent une grande variété d’inspiration et d’époques, de 1954 avec la chanson Smile de Charlie Chaplin jusqu’à la chanson One More Light de Linkin Park de 2017. La femme qui porte le tatouage « Smile » explique ainsi :

Le mot « smile » pour me rappeler de sourire même si le cœur n’y est pas. En anglais car c’est le titre de la chanson de Charlie Chaplin qui est juste magnifique et représente bien ce que j’avais en tête.

Dans une étude similaire, des chercheurs ont établi qu’au Mexique, les tatouages avec du lettrage contenaient souvent des paroles de chansons de rap et des prières. Dans mon étude, la phrase « Only God can judge me » apparaissait sur le corps de quatre femmes tatouées, mais aucune d’elles ne semblait savoir que la phrase vient de la chanson éponyme du rappeur nord-américain

. Une des tatouées explique ainsi les raisons de ce choix :

« Le tatouage rendait vraiment mieux en anglais. Sinon, c’est une phrase qu’énormément de monde a déjà faite en tatouage mais je trouve que c’est une très belle phrase. »

Elle a ressenti une connexion avec la phrase et son contenu, mais elle fait partie des 178 participants au sondage qui ne parlent pas l’anglais – soit moins de 30 % des répondants. Chiffre qui fait écho aux gens qui se font tatouer des lettrages asiatiques sans être capable de lire le message eux-mêmes : la chanteuse de pop nord-américaine Ariana Grande en fait partie. Selon le ministère de la Culture, seulement 31 % des Français déclarent maîtriser l’anglais malgré les programmes scolaires qui introduisent les langues étrangères dès la maternelle et permettent de poursuivre leur apprentissage tout au long de la scolarité.

Beaucoup de polyglottes

Selon mon étude, les personnes qui ne parlent qu’une seule langue sont minoritaires, malgré le préjugé courant qui associe les personnes tatouées à des rebelles qui n’ont pas un haut niveau d’éducation, voire à des marginaux ou encore à des personnalités déviantes. Le sondage que j’ai mené montre que 73 % des tatoués parlent deux langues, et que la moitié en parle trois. Selon le ministère de la Culture, 44 % des Français déclarent maîtriser une langue étrangère ; pour 31 %, donc la majorité d’entre eux, il s’agit de l’anglais.

Un tatoué, qui porte les tatouages « Nevermore » et « Forevermore » (« Jamais plus » et « À jamais ») dit connaître 20 langues :

« Anglais, italien, mandarin, russe, et les autres langues étudiées en hobby je ne les parle plus : norvégien, arabe, hébreu, finnois, islandais, allemand, espagnol, néerlandais, japonais, commencé le danois pour le fun, après les éternels latin, grec, et des langues imaginaires de Tolkien – le quenya et le sindarin – et j’essaie en ce moment d’apprendre l’ojibwa. »

Cela montre que certains des perceptions et préjugés sur les tatoués ne correspondent plus à la réalité – si tant est qu’ils aient jamais été fondés. Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui maîtrisent la langue qu’ils choisissent de se faire tatouer.

Une culture anglo-saxonne dominante

Le groupe de participants au sondage était sélectionné selon deux critères : porter un tatouage en anglais et être de langue maternelle française. Il n’est donc pas surprenant que les résultats montrent que l’anglais est la langue la plus tatouée ou la deuxième la plus parlée. En revanche, l’étude révèle que moins d’un quart des participants portent un tatouage dans leur langue maternelle. Cela montre que les Français ont envie de porter des lettrages rédigés dans une langue autre que la leur.

Selon les résultats de cette étude, le choix de se faire tatouer en anglais est souvent lié à deux éléments : l’esthétique du tatouage (255 tatouages) et l’origine de la phrase du tatouage (193 tatouages).

Un tatoué m’a expliqué qu’il a choisi « Love » et « Hate » pour ses phalanges parce que le nombre de lettres correspond aux doigts, contrairement aux mots français « amour » et « haine » qui obligent à tatouer les pouces et rendent le tatouage moins percutant visuellement. Ce tatouage a pu être inspiré par le film La Nuit du chasseur.

Un tatouage déjà visible dans le film _La nuit du chasseur_de Charles Laughton, en 1955, repris par de nombresues personnes depuis, sans forcément connaître la référence. CC BY

Selon Jean, un des tatoueurs interviewés, la simple présence de l’anglais dans le paysage linguistique en France influence le choix des tatouages :

« En fait, les Français veulent un anglais qui se, qui se dégage du français. Ils veulent être différents du français. Donc du coup, ils font du texte en anglais… On ne peut pas enlever la culture graphique ou cinématographique qui nous a insufflés tout le, tout le contexte anglais. Aujourd’hui on est baignés dedans depuis 20 ans, 30 ans, on est baignés dans l’anglicisme. »

Ce bain d’anglais crée une familiarité dans laquelle certains Français grandissent et correspond à une culture globale à laquelle ils s’identifient. Une des participantes, couturière de son état, porte cinq tatouages, dont trois qui contiennent de l’anglais : « Never forget your freedom », « Cry Baby », et « Handmade » (« N’oublie jamais ta liberté », « Pleurnicheuse », et « Fait main »). Elle explique que l’anglais l’a « toujours accompagnée » à travers les chansons qu’elle écoutait.

D’après Louisa, la phrase « Never forget your freedom », qu’elle a choisi de se faire tatouer sur le bras englobe plusieurs messages qui auraient été trop longs à exprimer en français : c’est donc les qualités de synthèse de la langue anglaise qui semblent l’avoir séduite.

Et vous, quelle phrase emblématique would you choose pour votre tatouage en anglais ?

Jeni Peake, English teacher (PhD in English studies), Université de Bordeaux

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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Comment fonctionnent l’implant Neuralink et les autres interfaces cerveau-machine

Un exemple de réseau de capteurs flexible et implantable, développés à l'université de Californie à San Diego. UC San Diego Jacobs School of Engineering, Flickr, CC BY
Clément Hébert, Université Grenoble Alpes (UGA) et Blaise Yvert, Inserm

Les interfaces électriques cerveau-machine implantables promettent des avancées majeures, aussi bien pour comprendre le fonctionnement du cerveau que pour compenser ou remplacer des fonctions perdues suite à un accident ou une maladie neurodégénérative : vision primaire, motricité, synthèse vocale ou écriture digitale.

Alors que la start-up Neuralink d'Elon Musk vient d'annoncer avoir posé son premier implant cérébral sur un patient, la plupart de ces interfaces sont encore loin d’être vraiment opérationnelles en clinique mais elles représentent tout de même déjà pour certains l’espoir d’augmenter les capacités humaines, avec des applications à la fois sensorielles (vision nocturne par exemple) et fonctionnelles (augmentation des capacités mnésiques ou intellectuelles par exemple). Même si nombre de ces applications relèvent encore de la science-fiction, comme la transmission de sensation ou l’augmentation de nos performances intellectuelles, d’autres ne paraissent pas hors de portée, comme la vision dans l’infrarouge ou l’ultraviolet par exemple.

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Même si des questions éthiques accompagnent le développement des interfaces cerveau-machine chez Neuralink, le propos de notre article est d’expliquer leur fonctionnement technique, leurs enjeux technologiques et le contraste entre les espoirs qu’elles suscitent et ce qu’elles sont actuellement capables de réaliser.

En effet, les dispositifs actuels sont confrontés à de multiples verrous technologiques et conceptuels. Les contraintes techniques limitent pour l’instant leur utilisation à des cas cliniques précis, où les risques liés à l’insertion d’un implant sont contrebalancés par l’estimation d’un bénéfice immédiat ou futur pour les patients. On est ainsi très loin de pouvoir utiliser ces implants en routine clinique et dans la vie de tous les jours, et qui plus est pour des applications ludiques ou encore d’augmentation des capacités humaines.

Où en sont les implants actuels, et notamment l’implant Neuralink ?

Pour la partie médicale et la compréhension du cerveau, les interfaces en développement au sein de laboratoires académiques et industriels offrent déjà des perspectives intéressantes. Mais peu d’outils académiques offrent à l’heure actuelle une solution complètement implantée avec autant d’électrodes et de quantité de données que celles de l’interface de Neuralink.

Celle-ci

à mettre en place une interface cerveau-machine implantable en une matinée, à la fois pour le domaine médical pour des personnes parlysées, mais aussi pour permettre à tout un chacun de contrôler son smartphone, un
, ou à terme d’augmenter ses capacités humaines. Pour cela, elle vise une technologie d’implants cérébraux enregistrant un grand nombre de neurones, qui n’aurait pas d’impact esthétique et ne présenterait aucun danger.

Si l’implant de Neuralink s’avère fonctionner de manière robuste, il pourrait permettre d’avancer vers un décodage plus précis de l’activité neuronale, la conception de neuroprothèses cliniques et la compréhension de modes de fonctionnement du cerveau inaccessibles jusqu’à présent.

Comment ça marche ? De l’implant neuronal à la neuroprothèse

Dans la littérature et l’actualité, on retrouve indistinctement les termes d’« interface électrique cerveau-machine », de « neuroprothèse » ou d’« implant neuronal ». Une « neuroprothèse » est un type d’interface cerveau-machine qui va permettre de suppléer ou de remplacer une fonction perdue. Tout comme le système nerveux envoie ou reçoit des informations de son environnement, les neuroprothèses vont capter de l’information de notre environnement à travers des systèmes artificiels pour la renvoyer vers le système nerveux ou bien capter l’information du système nerveux pour la renvoyer, soit vers lui-même, soit vers notre environnement à l’aide de dispositifs artificiels.

La neuroprothèse ou l’interface électrique cerveau-machine est constituée de plusieurs parties. En allant du système neuronal vers une interface utilisable pour l’humain (comme l’écran d’un ordinateur), les constituants d’une neuroprothèse sont les suivants : 1) un réseau d’électrodes mis en contact avec le tissu neuronal, 2) un système de connexion permettant de relier les électrodes à un système électronique, 3) un système de communication permettant d’envoyer des signaux vers les électrodes ou de recevoir les signaux collectés par les électrodes, 4) un système d’enregistrement des données, 5) un système de traitement et de décodage des données, 6) un système d’envoi de l’information vers un ou plusieurs effecteurs, par exemple un bras robotique. La partie implantable, l’« implant neuronal » à proprement parler, est actuellement composé des parties 1-2 ou 1-2-3.

Quelles sont les limites technologiques actuelles des interfaces cerveau-machine ?

L’objectif actuel est de disposer d’un implant neuronal ayant un grand nombre d'électrodes d’enregistrement ou de stimulation, dont l’efficacité se maintient sur des dizaines d’années. Si, malgré plus de trente années de recherche, cet objectif n’est pas encore atteint, c’est que de nombreux défis majeurs lui sont associés, notamment :

  • La chirurgie d’implantation doit être la moins traumatisante possible et en particulier ne pas léser les microvaisseaux sanguins du cortex sous peine de déclencher une réaction inflammatoire importante.

  • L’implant doit être le plus fin possible, voire flexible, de façon à ne pas engendrer de traumatisme trop important ou de réaction de rejet dans le cerveau lors de son insertion. De plus, à terme, la gangue de protection générée par le système nerveux peut empêcher la communication entre les électrodes et les neurones.

  • Pour enregistrer ou stimuler le plus de neurones possible, il a fallu développer des méthodes de microfabrication sur microdispositifs flexibles afin d’intégrer le plus grand nombre d’électrodes possible dans un espace très réduit. Les électrodes actuelles peuvent atteindre des tailles de l’ordre de 5 à 10 micromètres.

  • De nombreux nouveaux matériaux d’électrodes ont été développés afin de détecter les très faibles champs électriques générés par les neurones ou de les stimuler, ce que des métaux classiques comme le platine ne permettaient pas. Aujourd’hui, les performances des électrodes ont été grandement améliorées notamment grâce à l’introduction de matériaux poreux.

  • L’implant doit garder l’intégrité de ses performances électriques au cours du temps, mais les technologies flexibles actuelles sont sensibles à l’eau sur le long terme, ce qui affecte la durée de vie des implants. Ce point fait partie des verrous technologiques majeurs.

  • Afin de pouvoir se déplacer normalement en dehors d’un laboratoire ou d’un hôpital, les implants doivent pouvoir communiquer et s’alimenter en énergie, sans fils. Mais les technologies actuelles de transmission radiofréquence des signaux, lorsque les électrodes sont nombreuses, engendrent une élévation locale de la température qui est nocive pour les tissus neuronaux – autre verrou technologique majeur.

Les pistes pour concrétiser les interfaces cerveau-machine

Pour tenter de résoudre ces problèmes, l’entreprise Neuralink a par exemple conçu un réseau d’électrodes pour stimuler ou enregistrer l’activité neuronale, réparti sur plusieurs filaments de polymère flexible qui embarquent des microélectrodes. Les matériaux utilisés sont biocompatibles et des couches de carbure de silicium permettant d’assurer l’intégrité électronique des implants

(un concept issu de laboratoires de recherche de l’Université de Berkeley et également en cours de développement en France dans le cadre du projet SiCNeural financé par l'ANR). Enfin, chaque filament est connecté à une puce électronique qui sert à enregistrer l’activité neuronale ou générer des impulsions électriques pour la stimulation.

De plus, l’entreprise développe un robot autonome capable de réaliser toutes les étapes de la chirurgie d’implantation, de la trépanation à l’insertion des implants.

L’insertion des implants souples dans le cerveau n’est en effet pas simple et plusieurs stratégies ont été développées par différents laboratoires, comme la rigidification temporaire de l’implant à l’aide d’un polymère résorbable, l’utilisation d’un guide rigide ou d’une approche robotisée ressemblant à une « machine à coudre », également développée à Berkeley, qui enfile une aiguille dans un trou situé à l’extrémité de l’implant flexible afin de pousser l’implant dans le cerveau puis de retirer uniquement l’aiguille. Cette dernière méthode est reprise par Neuralink, qui la combine à un système de caméras repérant les zones de la surface du cortex non ou peu vascularisées où peuvent être insérés les implants en limitant les microsaignements.

Analyser et transmettre les données, sans surchauffe

Quant à la problématique de l’échauffement local dû à l’analyse et la transmission sans fil des données, deux technologies avaient jusque-là été appliquées chez l’humain.

La première est celle de la société BlackRock Neurotech, qui déporte les circuits de traitement et d’envoi des signaux au-dessus de la boite crânienne. Ceci génère des problèmes d’esthétisme mais aussi des risques d’infections à cause des fils qui courent de la peau vers le cerveau.

La deuxième technologie est celle du laboratoire CLINATEC du CEA Grenoble, qui ne collecte que des signaux ne nécessitant pas une haute précision de numérisation et n’enregistre l’information que sur un maximum de 64 électrodes simultanément. Ce laboratoire a ainsi réalisé le premier implant neuronal sans fil disposant d’autant de voies, et complètement intégré sous la peau. Il est inséré en remplacement d’une partie de l’os du crâne. Neuralink propose de son côté une puce plus petite, également insérée dans l'os du crâne, traitant plus de 1000 voies mais envoyant uniquement certaines caractéristiques des signaux neuronaux, jugées importantes grâce à des algorithmes embarqués.

Concernant la durée de vie des implants, il faudra encore attendre un peu pour voir si la stratégie est efficace et permet d’avoir une interface stable sur plusieurs années. Une fois cette limite dépassée, il faudra certainement s’attaquer au recueil d’un nombre encore plus grand de signaux. À l’heure actuelle, on peut estimer que la technologie Neuralink peut enregistrer jusqu’à environ 3000 neurones avec ses 1024 électrodes : c’est impressionnant du point de vue de l’état de l’art, mais très loin d’être suffisant pour appréhender l’immensité des signaux cérébraux.

Conceptuellement, malgré une très bonne miniaturisation, il sera très difficile d’atteindre l’enregistrement de millions de neurones individuels avec cette technologie sans que l’implant et la connectique associée prennent une place trop importante dans le cerveau. D’autres concepts devront peut-être être imaginés pour aller au-delà de ces limites.

Clément Hébert, Chargé de recherche implants Neuronaux, neuroprothèses, Inserm U1216 Grenoble Institut des Neurosciences, Université Grenoble Alpes (UGA) et Blaise Yvert, Directeur de recherche à l'Inserm, responsable de l'équipe Neurotechnologies et Dynamique des Réseaux, Inserm

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.