Réseaux sociaux : le pouvoir insoupçonné des influenceurs sur notre santé

Economie

Le médecin Michel Cymes compte aujourd’hui 140 000 followers sur Instagram et 371 800 sur TikTok. Wikimedia commons, CC BY-SA

The Conversation

Réseaux sociaux : le pouvoir insoupçonné des influenceurs sur notre santé

Le médecin Michel Cymes compte aujourd’hui 140 000 followers sur Instagram et 371 800 sur TikTok. Wikimedia commons, CC BY-SA
Loick Menvielle, EDHEC Business School; Léna Griset, EDHEC Business School et Rupanwita Dash, EDHEC Business School

Les réseaux sociaux constituent un territoire marketing et commercial essentiel pour toutes les entreprises. Un état de fait qui place les influenceurs au centre du jeu, y compris dans le secteur de la santé, pourtant considéré comme « non marchand » en France. Comme dans d’autres domaines, ces personnalités suivies, voire adulées sur les plates-formes en ligne, sont pourtant en mesure d’influencer la perception des consommateurs envers les acteurs de la santé.

Parmi les plus suivis, citons : Michel Cymes (140 000 followers sur Instagram et 371 800 sur TikTok) ou encore Marine Lorphelin (984 000 followers sur Instagram et 17 800 sur TikTok) au sein de l’hexagone, mais aussi de Dr Mike Varshavski (4,5 millions de followers sur Instagram et 2 millions sur TikTok), outre-Atlantique.

Conseiller virtuel de confiance

La réalité de cette influence constitue l’une des conclusions de notre dernière étude (à paraître), réalisée dans le cadre de la chaire « Management in Innovative Health » de l’EDHEC Business School. Nous relevons notamment dans cette enquête menée auprès de 630 personnes que les influenceurs jouent un rôle clé dans la confiance que les individus accordent aux marques. Autrement dit, dans un monde où les patients cherchent souvent des conseils fiables dans la mer agitée des informations en ligne, l’influenceur parlant de santé reste perçu comme un conseiller virtuel de confiance.

Au travers de notre étude, menée en France auprès de plus de 600 répondants (dont une grande partie est constituée des jeunes et utilisateurs des réseaux sociaux), il apparait que près de 40 % de la population interrogée semble attribuer une certaine importance à l’homophilie, c’est-à-dire la similarité perçue, lorsqu’il s’agit d’évaluer le niveau d’expertise des influenceurs.

De plus, près d’un tiers des participants estime que l’interaction avec des influenceurs du domaine de la santé les incite à considérer ces derniers comme des experts en médecine. Enfin, dans environ un cas sur quatre, la fiabilité des informations médicales diffusées par les influenceurs dépend non seulement des similitudes perçues avec ces derniers, mais également de la manière dont ils interagissent avec leur communauté.

Ainsi, plus la ressemblance est forte et plus il existe un niveau d’interaction élevé, plus cela impactera positivement la fiabilité des recommandations émises, augmentant de façon significative la confiance vis-à-vis des marques de médicaments précis.

Nos résultats confirment donc d’autres études récentes qui montrent que ces influenceurs, de par leur dynamique interpersonnelle unique avec leurs followers, peuvent être plus efficaces que les célébrités ou les publicités traditionnelles dans la construction de la confiance des consommateurs envers une marque.

Transparence nécessaire

Ces analyses ont des implications clés pour les praticiens du marketing et les entreprises de santé. La recherche souligne la nécessité d’une évaluation plus nuancée des influenceurs, prenant en compte leur expertise, leur interactivité, leur fiabilité et leur homophilie, pour accroître la confiance envers une marque et atteindre des résultats marketing souhaitables. Pour les influenceurs eux-mêmes, maintenir leur expertise et leur fiabilité est par ailleurs essentiel pour rester pertinents.

Cependant, il est essentiel que les acteurs pharmaceutiques et les parties prenantes impliquées dans la délivrance de soins de santé appréhendent et ne mésestiment pas la place et le rôle de ces influenceurs. Bien que le contexte réglementaire français impose un cadre strict concernant la communication et la publicité dans le domaine de la santé, il devient nécessaire pour toutes les parties prenantes du secteur médical d’investir ce champ de réflexion duquel elles ne peuvent se tenir à distance.

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L’accélération du phénomène des influenceurs santé aux États-Unis – songeons par exemple au scandale de l’Ozempic, un antidiabétique détourné pour perdre du poids abondamment recommandé en ligne –, doit notamment nous faire prendre conscience de l’anticipation nécessaire de phénomènes sur lesquels les acteurs pharmaceutiques et médicaux n’auraient plus le pouvoir, notamment en termes de communication et de message transmis aux patients.

Alors que les réseaux sociaux influencent notre perception de l’information et de la santé, les entreprises sont donc confrontées à un réel défi engendré par la nécessité de s’adapter et de naviguer dans ce paysage complexe dans le respect qu’imposent les normes éthiques.

Dans un monde hyperconnecté, si les influenceurs de santé constituent des alliés précieux pour les entreprises, seules les marques du secteur qui sauront établir des relations de confiance authentiques avec leur public parviendront à obtenir un avantage décisif sur leurs concurrents. Or, cette confiance ne pourra être acquise et soutenue que par des pratiques éthiques irréprochables, impliquant de fait une transparence totale vis-à-vis du bien-être du public. En définitive, c’est en alliant pouvoir d’influence et éthique que les marques du secteur de la santé se forgeront une réputation solide et durable, fondée sur une confiance sincère et réciproque des principaux acteurs.

Loick Menvielle, Professor, Management in Innovative Health Chair Director, EDHEC Business School; Léna Griset, Research Assistant, EDHEC Business School et Rupanwita Dash, Senior Research Assistant, EDHEC Business School

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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