A Dreux, les usagers quotidiens de la SNCF face à l’absence de train

Economie

Pour la troisième journée de suite, aucun train ne circule entre Dreux et Paris. Les navetteurs euréliens sont contraints de trouver des solutions alternatives durant la grève contre la réforme des retraites

« Information indisponible ». Le panneau lumineux qui annonce habituellement les prochains départs en gare de Dreux (Eure-et-Loir) est vierge. Les lettres blanches sur fond bleu attirent l’attention, mais pour la troisième journée de suite, aucun train ne circule entre Dreux et Paris. Idem dans le sens inverse. Pour pouvoir monter dans une rame, les voyageurs doivent mettre le cap à l’est, à une cinquantaine de kilomètres, et rejoindre la gare de Plaisir-Grignon (Yvelines), près de Versailles : les six départs qui y sont programmés ont été reportés sur la fiche d’information relative aux mouvements sociaux.

A Dreux, ville d’un peu plus de 30 000 habitants, entre 3 500 et 4 000 font la navette quotidienne pour se rendre au travail. Salariés majoritairement de condition modeste (mais pas seulement), ils sont très dépendants de la situation sur la ligne N, qui relève du réseau francilien. La demande d’un titre de transport bon marché pour compléter le passe Navigo, qui permet seulement d’aller de Paris à Houdan, commune située à une vingtaine de kilomètres de Dreux, est un sujet récurrent, voire un enjeu électoral.

Véhicule personnel, covoiturage, télétravail…

Depuis le début du mouvement de grève contre la réforme des retraites, les préoccupations de ces usagers quotidiens des transports en commun sont redevenues plus basiques. Employée de crèche à Versailles, Awa a pris la précaution de se rendre à la gare pour s’informer des conditions de trafic dès dimanche soir. « Je vais voir avec Blablacar [application de covoiturage] », décide-t-elle après avoir photographié le tableau de circulation. A quelques mètres de là, les deux guichetiers complètent les informations affichées. « Pour mardi, les prévisions de trafic seront connues à 17 heures », répondent-ils le plus souvent à des interlocuteurs plutôt courtois et patients.

« Je commence normalement à 8 h 30, mais là je vais partir de chez moi vers 6 h 15 » – Aïcha

Aide-soignante à Versailles, titulaire d’un contrat d’intérim depuis septembre, Aïcha garde son calme mais affiche son dépit. Elle ne veut prendre aucun risque, pour conserver son poste. « Je prendrai ma voiture. Je commence normalement à 8 h 30, mais là je vais partir de chez moi vers 6 h 15. J’ai peur que ça ne roule pas très bien ! », expliquait-elle dimanche. De fait, d’importants ralentissements ont été signalés lundi matin dans les Yvelines.

Frédéric, lui, fait partie des usagers de la nationale 12. Employé au service relations clients d’une bibliothèque du quartier Saint-Michel à Paris, il fait du covoiturage avec l’un de ses collègues. Théa, elle aussi, s’est orientée vers cette solution. Comptable dans le quartier Montparnasse, elle a posé un congé jeudi 5 décembre pour éviter les affres d’une journée sans transport en commun, mais ne veut pas trop puiser dans sa réserve de jours de vacances.

Le risque d’un conflit qui s’éternise

Reste le télétravail. Responsable logistique à Satory, un quartier de Versailles, Mickaël a la possibilité de recourir à cette option. Mais pas systématiquement. Après l’avoir envisagé, il a finalement trouvé un conducteur qui se rend au même endroit. « J’avais essayé dimanche soir, mais personne n’était disponible. J’ai fini par trouver un accord avec quelqu’un, dans la nuit. Je ferai pareil au retour. »

Beaucoup de voyageurs partagent la crainte d’un conflit qui risque de s’éterniser jusqu’aux fêtes, voire au-delà. Ce qui, dans un secteur géographique ferroviaire où le taux de grévistes est traditionnellement élevé, provoquerait une véritable paralysie. Ironie du sort, si l’on peut dire, même les trains rapides en provenance de Granville, en Normandie, qui font en principe halte à Dreux, ne marquent plus l’arrêt pendant les grèves.

Si le 8 h 17 s’est arrêté lundi matin pendant une quinzaine de minutes, c’était pour permettre à un voyageur mal en point de recevoir des soins. Après examen, l’homme a été transporté aux urgences. Informés par des agents SNCF vêtus de rouge que ce train ne leur était pas accessible, les quelques Drouais présents ont suivi le ballet des secouristes avec cette indifférence nommée résignation.


Source : A Dreux, les usagers quotidiens de la SNCF face à l’absence de train


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