Chevènement : « Il faut retrouver l’esprit de la Ve République, le sens de l’intérêt public »

Politique

Alors qu’il publie un livre sur ses cinquante ans d’engagement politique, le président de la fondation Res Publica et ancien candidat à la présidentielle de 2002, analyse la crise que traversent actuellement la France et l’Europe.

Président de la fondation Res Publica, Jean-Pierre Chevènement a publié, le 14 février, Passion de la France (Robert Laffont, 1 568 pages, 34 euros), un ouvrage dans lequel celui qui a été ministre de l’éducation nationale, de la défense comme de l’intérieur, revient sur les moments forts de ses cinq décennies d’engagements.

L’ex-candidat à la présidentielle de 2002 parle des thèmes qui lui sont chers – la nation et la République, l’Etat et le citoyen, l’Europe et la relation franco-allemande – et livre son analyse de la crise politique actuelle.

Quel regard portez-vous sur la situation sociale créée par les « gilets jaunes » ?

C’est une crise française mais aussi européenne. Elle touche tous les pays engagés dans la mondialisation depuis près d’un demi-siècle. Il n’y a pas une nation européenne qui ne soit en crise. En France, celle-ci revêt des caractéristiques originales. Les « gilets jaunes » s’inscrivent dans une tradition de jacquerie, d’émeute populaire.

On pourrait évoquer le sans-culotisme. Encore que ce dernier débouchait sur un projet républicain, plus ou moins illuministe, au sens des Lumières, ou égalitariste, au sens du babouvisme. Rien de comparable avec les « gilets jaunes ». Mais nous constatons, à l’aune de cette crise, une fracture sociale, territoriale, démocratique, institutionnelle et européenne qui vient de loin. 

C’est-à-dire ?

La fracture sociale est l’effet d’une désindustrialisation consentie depuis quarante ans par nos classes dirigeantes : la part de notre industrie dans notre production est passée de plus de 20 % à 10 %. Les classes moyennes inférieures sont socialement les plus touchées, en France comme dans les pays les plus anciennement industrialisés.

Vient ensuite la fracture territoriale : treize trop grandes régions et le relèvement à 15 000 habitants du seuil des intercommunalités. On en est même venu à vouloir élire leurs présidents au suffrage universel ! C’est le meilleur moyen de délégitimer les maires et de saper la commune en tant qu’échelon de base de la démocratie.

A quarante ou cinquante communes, les décisions ne sont plus prises par les maires mais par le directeur général des services !

A cela s’ajoute une crise de la démocratie représentative…

Le sentiment que tout est permis et qu’il n’y a plus de règles de vie collective s’est banalisé. Le déclin du civisme ne peut nourrir que l’extrême droite.

La crise est aussi institutionnelle. Le quinquennat a excessivement durci les institutions de la Ve République : les députés, élus dans la foulée de l’élection présidentielle, apparaissent comme les agents du gouvernement et non plus comme les représentants du peuple. Il faudrait revenir sur cette mesure qui, à l’usage, comporte plus de défauts que d’avantages. Chirac, Sarkozy, Hollande, Macron, cette démocratie corsetée éloigne les citoyens du politique.


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