Une avocate : « J’ai gagné plein de dossiers grâce à des captures d’écran »

Sociétés

Ils travaillent dans la justice et il leur arrive de chercher sur Internet les traces de leurs clients ou des parties adverses.

De nombreuses fois, dans le cadre de procédures de divorce, Magali Dejardin a piégé un époux ou une épouse avec quelques unes de leurs publications Facebook. L’avocate ne s’en cache pas :

« Ça me fait plutôt rire. J’ai gagné plein de dossiers grâce aux captures d’écran. »

Il y a les photos de ceux qui viennent de quitter partenaire et enfants et qui embrassent leur nouveau conjoint à pleine bouche, l’esprit libre (manque de bol, l’adultère est encore considéré comme une faute jusqu’au prononcé du divorce). Magali Dejardin en rajoute :

« Ils sont hyper contents, c’est la crise de la quarantaine et ils s’affichent avec leur nouveau chéri sur une plage. Je n’ai plus qu’à cueillir. »

Un joli bolide sur Facebook

Il y a les maris et les femmes qui ne paient pas les pensions alimentaires parce qu’ils sont « dans une situation financière déplorable ».

Tiens, lui s’affiche pourtant avec un joli bolide sur Facebook : « Mon nouveau joujou » (qui a dû lui coûter quelques briques). Un peu plus loin, des photos de vacances exotiques.

A chaque fois, Magali fait des captures d’écran et les verse au dossier. La duperie sur le train de vie est difficile à prouver alors ces éléments glanés sur les réseaux sociaux sont de petits cadeaux.

« Je me souviens d’un homme qui assurait ne pas avoir de travail mais tenait une page Facebook consacrée à son activité de mécano au black. Dans les commentaires : “Merci pour tout, deux fois moins cher qu’en garage pour le changement du joint de culasse”. »

Pour un autre, l’emploi n’est pas indiqué dans le dossier mais est inscrit clairement sur le profil LinkedIn. Voilà qui est parfait.

En appel, Magali greffe aussi les commentaires des parties adverses, publiés quelques jours plus tôt sur leur compte (non sécurisé) : « Le juge est un con... l’avocate, une vraie salope... » Les captures ont généralement tendance à irriter les magistrats mais font rire l’avocate.

Moins cher qu’un détective privé

Magali Dejardin a commencé à traîner sur Facebook quand elle s’est rendu compte que ses clients lui apportaient régulièrement des impressions écran. Comme elle n’avait pas de compte personnel sur le réseau social, elle a d’abord emprunté celui de son associé avant d’ouvrir le sien, sous pseudo, qui lui sert uniquement à « stalker » les parties adverses (stalker désigne le fait d’espionner quelqu’un sur Internet).

C’est rapide, efficace et forcément moins cher qu’un détective privé. Sur Facebook, Magali Dejardin ne demande personne en ami. Pour récupérer des preuves, il lui suffit de se rendre sur le profil des ex : beaucoup ne sécurisent pas leurs données.

Ce « manque de pudeur » – il peut aussi s’agir de négligence vis-à-vis des paramètres de confidentialité – étonne l’avocate.

« Les gens sont complètement exhibitionnistes, ils ne protègent pas leur intimité. On peut parler des ados mais alors les adultes... »

Pas de raisons de s’en priver

S’est-elle déjà vu refuser une capture d’écran par un juge ? Non. Le droit de la preuve, dans le cadre d’un divorce, est souple et dans le Code civil (article 259-1), c’est assez clair :

« Un époux ne peut verser aux débats un élément de preuve qu’il aurait obtenu par violence ou fraude. »

Si l’avocate branchait sur Meetic une femme ou un mari ou le/la dupait sur Facebook en se faisant passer pour un(e) autre, il y aurait faute. Les éléments que Magali récolte sur les réseaux sociaux sont simplement publics et donc recevables.

« Dans la mesure ou les preuves sont à disposition, il n’y a pas de raison pour qu’on s’en prive. »

A ses clients, l’avocate conseille de faire attention à ce qu’ils disent et publient sur Internet pendant le temps de la procédure. Magali n’a jamais vu de confrères les piéger en utilisant la même méthode. « Il va falloir probablement que je m’adapte un jour à une nouvelle technologie », réfléchit-elle à voix haute....

Lire la suite - Une avocate : « J’ai gagné plein de dossiers grâce à des captures d’écran »

Facebook Pin It

Articles en Relation

Légalisation du cannabis récréatif : les défis français Dans un rapport publié début 2023, le Conseil économique et social recommande une légalisation encadrée du cannabis en France. Wesley Gibbs / Unsplash...
Transhumanisme : la recherche de l’immortalité a-t-elle un sens ? Selon les transhumanistes, la quête de l’immortalité passe par le développement de technologies qui prolongent la durée de vie humaine. Teo Tarras / S...
Audiovisuel : sanctionner sans censurer, la difficile mission de l'Arcom Après les insultes proférées par Cyril Hanouna contre le député LFI Louis Boyard, C8 a écopé d'une amende record de 3,5 millions d'euros. Capture d'éc...
Les podcasts « Jeunes de quartier » : leur quotidien raconté par eux-mêmes Des jeunes habitants de Saint-Denis (93) qui ont participé à la recherche participative Pop-Art. Author provided Les podcasts « Jeunes de quartie...
« Penser à tout » : pourquoi la charge mentale des femmes n’est pas près de s’al... Image de freepik « Penser à tout » : pourquoi la charge mentale des femmes n’est pas près de s’alléger Selon l'Ins...
« Mon Espace Santé » : les Français restent méfiants face à la collecte de leurs... 10 millions des 65,7 millions de détenteurs d'un compte Mon espace santé ont activé leur carnet de santé numérique. Shutterstock « Mon Espace S...

ACTUALITÉS SHOPPING IZIVA