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Le témoignage de Frédéric Pierucci, ancien cadre de l’entreprise, invite à réexaminer les circonstances de la vente, en 2014, du champion français de l’énergie à l’américain General Electric

L’affaire Alstom, véritable thriller d’Etat, est relancée. Outré par le scénario de la vente en 2014 du champion français de l’énergie à l’américain General Electric (GE), un homme ne veut plus se taire. Frédéric Pierucci, 51 ans, publie, mercredi 16 janvier, avec Matthieu Aron, journaliste à L’Obs,Le Piège américain. Cet ancien cadre dirigeant d’Alstom, emprisonné aux Etats-Unis pendant plus de deux ans pour « corruption » après le lancement d’une enquête du Department of Justice (DoJ) sur son entreprise, a réservé au Monde sa première prise de parole publique. A le lire, son histoire personnelle illustrerait la guerre économique que les Etats-Unis livrent à l’Europe pour s’emparer de ses pépites industrielles « en détournant le droit et la morale ».

Le sentiment que la cession d’Alstom a été une vaste partie de poker menteur est partagé à gauche comme à droite au sein des anciens membres de la commission d’enquête parlementaire créée fin octobre 2017 pour examiner « les décisions de l’Etat en matière de politique industrielle ». « Il reste des zones d’ombre dans cette affaire », estime Delphine Batho, députée (non inscrite) des Deux-Sèvres et ancienne ministre de l’écologie sous François Hollande. Convaincu pour sa part qu’il s’agit d’un « scandale national », Daniel Fasquelle, député (LR) du Pas-de-Calais, confirme qu’« il était difficile de démêler le vrai du faux dans ce dossier très technique ». Quant à Arnaud Montebourg, à l’époque ministre de l’économie, il s’énerve encore « des histoires à dormir debout racontées par les dirigeants d’Alstom ».

La crise financière de 2008 conduit en effet le PDG d’Alstom, Patrick Kron, à chercher, au début des années 2010, des alliances en Chine pour la branche énergie et en Russie pour la partie transports. La situation se complique quand, en 2012, des rumeurs persistantes font état du souhait du groupe Bouygues de céder sa participation de 29,4 % dans l’entreprise – un conglomérat basé sur trois activités : énergie, réseau électrique et transport. En 2014, la gouvernance d’Alstom choisit l’américain GE plutôt que l’allemand Siemens pour le rachat de sa branche énergie. Ainsi, l’entretien et le renouvellement des turboalternateurs des 58 réacteurs nucléaires français, la production des turbines Arabelle destinées aux réacteurs EPR, la fourniture des turbines de propulsion des quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins et du porte-avions Charles-de-Gaulle relèvent désormais des Etats-Unis.


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