Des fourmis bien armées pour récolter du nectar

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La fourmi Ectatomma sur une feuille d’Inga, Guyane. Romain Garrouste, MNHN, Fourni par l'auteur

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Des fourmis bien armées pour récolter du nectar

La fourmi Ectatomma sur une feuille d’Inga, Guyane. Romain Garrouste, MNHN, Fourni par l'auteur
Romain Garrouste, Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)

Les fourmis sont des insectes étonnants. Elles se sont adaptées de façon variée, notamment par leur extraordinaire et complexe vie sociale, et des « mutualismes » remarquables avec les plantes. Elles font partie du succès phénoménal des insectes sur notre planète, par leur biomasse considérable (des millions de tonnes, plus de 10 % de tous les organismes réunis) et leur diversité.

La fourmi tropicale des Amériques Ectatomma (Hyménoptères Formicidae) possède des mandibules impressionnantes. Ces outils massifs ne servent pas des fins guerrières, mais à récupérer délicatement le nectar sucré produit par des glandes végétales, comme les « glandes à nectar ».

En effet, les insectes raffolent du nectar, cette substance nutritive sucrée, et les plantes ne le produisent pas seulement au niveau des fleurs (où il attire des pollinisateurs). De nombreuses structures spéciales, sur les feuilles par exemple, sécrètent également du nectar, dit « nectar extrafloral ».

La forme incurvée des épaisses mandibules de la fourmi Ectatomma permet à une goutte de liquide sucré de s’y maintenir facilement pour être transportée jusqu’à la fourmilière pour y nourrir les larves.

Ici, la fourmi surveille une glande à nectar (petite cupule entre les feuilles) sur une feuille d’Inga, un arbre de la famille des légumineuses de la forêt guyanaise. En échange, la plante est protégée par les fourmis contre les agresseurs qui voudraient s’en prendre à leurs feuilles, fruits ou graines, ou consommer à leur place le nectar. C’est donc une véritable co-évolution entre les fourmis et les plantes pour arriver à ce mutualisme.

Se nourrir et protéger la plante

Les fournis sont en général omnivores et ne se nourrissent pas que de nectar. En effet, dans un même nid, une partie des ouvrières chasse des insectes dans les arbres, et l’autre partie récolte le nectar. Leurs nids sont dans le sol, à la base des arbres, où elles élèvent leurs larves avec ces deux types de nourritures.

La co-évolution entre les insectes et les plantes est l’un des moteurs de l’évolution de nos écosystèmes. Une des interactions les plus fondamentales entre plantes et insectes est la pollinisation, avec l’apparition des plantes à fleurs qui ont tant intrigué Charles Darwin dans ses profondes réflexions sur l’évolution. Les plantes à fleurs sont apparues au Jurassique et les insectes ont joué un rôle dans leur succès, qui a été fulgurant mais difficilement explicable, et qui a tant intrigué Charles Darwin dans ses profondes réflexions sur l’évolution.

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Les fourmis Ectatomma ne sont pas les seules à avoir des adaptations mandibulaires. De nombreuses autres adaptations existent : dans le registre fossile, certaines sont tellement extraordinaires que l’on ne sait pas à quoi elles servaient. Par exemple les « fourmis licornes » présentent des appendices céphaliques et des mandibules tellement transformées que l’on ne sait pas à quoi elle servait.

Lorsque ces « mutualismes », qui ne sont pas des relations obligatoires (les fourmis peuvent se passer de la plante et inversement) le deviennent, alors on parle de « symbioses », comme avec certains champignons. Voilà bien l’un des « superpouvoirs » que les insectes ont développés au cours des 300 millions d’évolution connue de ce groupe majeur d’animaux… qui seraient en fait encore plus vieux, et auraient autour de 470 millions d’années (les mammifères, en comparaison, ont environ 200 millions d’années).


Pour en savoir plus, découvrez le film « Mystérieux insectes » sur France 5, dont l’auteur a été à l’origine et conseiller scientifique.

Romain Garrouste, Chercheur à l’Institut de systématique, évolution, biodiversité (ISYEB), Muséum national d’histoire naturelle (MNHN)

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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