Un satellite pour surveiller les déchets plastique

Environnement

Depuis plusieurs mois, le satellite Sentinel 3A, de l'Agence spatiale européenne, sert à une expérience audacieuse : tenter d'observer depuis l'orbite les déchets en plastique qui jonchent les océans de la planète. Si l'essai est concluant, les satellites Sentinel 3 seront mobilisés pour cette tâche jusqu'à ce que l'ESA décide — mais ce n'est pas certain — de construire un satellite dédié.


Chaque seconde, 100 tonnes de déchets, sur les 4 milliards produites annuellement, finissent en mer, dont une grande partie est constituée de matière plastique. Certains n'hésitent pas à parler de septième continent pour désigner les accumulations de ces débris flottants dans le nord de l'océan Pacifique. Piégés par les courants marins, ils couvriraient une superficie plus grande que celle de la France - soit près de 640.000 km2 !

Objets flottants ou microparticules, ces déchets en plastique se déposent sur les plages, se dispersent en mer et se retrouvent sur les fonds marins. Ils mettent en danger les animaux marins mais aussi les humains puisque ces déchets pénètrent dans la chaîne alimentaire. Ils constituent désormais un défi mondial avec des conséquences à long terme inconnues.

Depuis le mois de septembre 2017, l'Agence spatiale européenne teste la détection de ces déchets en plastique depuis Sentinel 3A, en orbite autour de la Terre à près de 800 kilomètres d'altitude. Ce satellite a la particularité d'observer la couleur de l’eau, seul moyen d'étudier la subsurface des océans. C'est indispensable, car là se trouve l'essentiel du phytoplancton, ces minuscules végétaux marins à la base de la chaîne alimentaire océanique. Les mesures de couleur permettent d'en estimer la concentration et de la suivre dans le temps et l'espace.

Concentrations des déchets en plastique dans les eaux de surface à l'échelle mondiale avec un zoom sur la mer Méditerranée. Chaque point de couleur indique une concentration, en grammes de déchets par kilomètre carré. © Cozar et al., Plastic Accumulation in the Mediterranean Sea

L'idée de l'ESA et de ses partenaires sur ce projet, Argans Limited en France et Plymouth Marine Laboratory au Royaume-Uni, est de voir si Sentinel 3A peut discerner ces déchets en plastique. Comme le souligne Paolo Corradi, en charge du projet à l'ESA, « nous ne parlons pas de repérer des déchets flottants, mais plutôt d'identifier une signature spectrale du plastique prélevée sur orbite, de la même manière qu'un logiciel de traitement peut aujourd'hui détecter des concentrations de phytoplancton, de sédiments en suspension et de pollution hydrique ». L'idée est moins saugrenue qu'il y paraît. Chaque type de plastique présente en effet une sorte d'empreinte digitale spécifique, utilisée dans l'industrie du recyclage pour trier les articles en plastique à partir d'autres déchets sur un tapis roulant.

Il reste à évaluer les besoins et les technologies

D'un point de vue scientifique, ces observations depuis l'espace serviront à tracer une carte mondiale en temps réel, montrant les concentrations de plastique dans les océans. Par rapport aux simulations, réalistes, ces cartes basées sur des mesures réelles fourniront néanmoins des informations bien plus significatives à la communauté scientifique et aux pouvoirs publics.

Demain, l'ESA pourrait décider de construire un satellite dédié à cette tâche, observant dans l'infrarouge. D'où cette expérimentation dont Paolo Corradi attend qu'elle donne une « idée du type de concentration de déchets marins visible depuis l'espace en utilisant la technologie actuelle », ou bien si cela n'est finalement pas possible depuis l'orbite. Il faudrait alors « utiliser des avions ou des drones».

Ce n'est pas la première fois qu'un satellite est utilisé pour observer des déchets en plastique marins. Par exemple, à partir des données de satellites, sont tracées des cartes des courants océaniques permettent de simuler l'accumulation de déchets dans de vastes gyres dans les océans Atlantique, Indien et Pacifique.


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