Rejet à l’Assemblée de l’inscription dans la loi de la date de sortie du glyphosate

Economie

Il est 2 h 02 du matin, mardi 29 mai, et l’interdiction, dans les trois ans, du glyphosate, la substance classée cancérogène probable par l’Organisation mondiale de la santé, a été rejetée par les députés. Elle faisait l’objet de plusieurs amendements, traduisant la promesse d’Emmanuel Macron d’interdire en France cette substance, principe actif du Roundup de Monsanto, « dès que des alternatives auront été trouvées et au plus tard dans trois ans ».

Graver dans le marbre de la loi cette interdiction était le but de Matthieu Orphelin, député LREM du Maine-et-Loire et proche du ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot. Son amendement a été repoussé (20 députés pour, 63 contre).

Sa proposition était pourtant agrémentée de possibles dérogations afin que certains secteurs de l’agriculture ne souffrent pas d’une interdiction de cette substance trop brutale – à la différence de l’amendement de Delphine Batho, députée Génération écologie des Deux-Sèvres et ex-ministre de l’agriculture, qui ne prévoyait pas de dérogation. Elle avait été rejetée par le rapporteur de la loi, Jean-Baptiste Moreau, député LREM de la Creuse, comme par le ministre de l’agriculture, Stéphane Travert. « J’ai complètement confiance dans les engagements du Président de la république et je n’ai pas besoin de l’inscrire dans la loi () C’est relancer les tensions qui s’étaient apaisées », avait déclaré M. Moreau, ajoutant qu’il fallait « laisser le temps ».

« Pas de controverse scientifique »

Des mots qui pouvaient laisser planer le doute sur une sortie réelle du glyphosate d’ici à 2021. Et qui ont fait dire à M. Orphelin, revendiquant lui aussi l’autorité de la promesse présidentielle, qu’il n’était « pas convaincu par les engagements » du ministre sur l’interdiction. La députée LREM du Doubs, Fannette Charvier avait, elle, expliqué que « trois ans, ce n’est pas un arrêt brutal » et qu’on ne trouve pas les alternatives, quand il n’y a pas de date butoir. « Les paroles s’envolent, les écrits restent », concluait la députée. Et Barabara Pompili, ancienne secrétaire d’Etat (écologiste) chargée de la biodiversité et députée LREM (Somme) indiquait ses doutes sur la volonté de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) de réellement chercher des alternatives à l’utilisation du glyphosate. « Le risque, c’est que certaines filières passent les trois ans à démontrer que ce n’est pas possible. Si on leur dit “dans trois ans, c’est fini”, elles seront dans un autre état d’esprit. »

Cet argument n’a pas convaincu M. Travert qui a surtout insisté sur la nécessité de trouver une solution pour les agriculteurs, une condition avancée aussi par le chef de l’Etat. Rappelant la ré-autorisation européenne pour cinq ans, « sur fond de controverse scientifique sur sa dangerosité », il a insisté sur la nécessité d’« approfondir les connaissances sur le glyphosate ». Le ministre de l’agriculture a aussi annoncé la création d’une commission de suivi qui associerait les groupes de l’assemblée nationale.

La quasi-totalité de ces groupes a fait corps derrière le ministre pour rejeter les amendements de M. Orphelin, de Mme Batho ou encore de la commission du développement durable de l’assemblée nationale, à l’exception du représentant des députés communistes qui s’est abstenu. Ceux de La France insoumise (FI) ont, en revanche, voté pour ces amendements. Le député (FI) de la Gironde, Loïc Prud’homme a même repris le ministre en lui expliquant « qu’il n’y avait pas de controverse scientifique sur le glyphosate », jugeant ce débat « emblématique du renoncement du gouvernement sur le modèle agricole ».

« Fantasmes de complot »

Ce débat sur le glyphosate, qui ne peut certes résumer l’ensemble des questions sanitaires et environnementales ayant marqué le débat sur le projet de loi « pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine et durable », a aussi révélé les relations troubles entre le politique et certains lobbies. Illustration avec la révélation par Mme Batho de la façon dont l’Union des industries de la protection des plantes (UIPP) a pu se procurer le texte de l’un de ces amendements avant que celui-ci ne soit rendu public.

A la tribune de l’assemblée, la députée des Deux-Sèvres avait ainsi dénoncé une « atteinte à la souveraineté » des délibérations des élus : l’amendement qu’elle avait déposé le 22 mars, prévoyant l’interdiction du glyphosate dans un délai de trois ans, a selon elle été porté à la connaissance de l’UIPP, et ce avant son traitement par le service informatique interne de l’Assemblée. Mme Batho a expliqué avoir eu copie d’une note interne de cette association professionnelle, qui regroupe les principaux industriels commercialisant des produits à base de glyphosate citant l’amendement en question. De son côté, l’UIPP a fustigé dans un communiqué ceux qui « entretiennent les Français dans certains “fantasmes de complot” », démentant avoir eu connaissance de l’amendement en question avant sa publication.


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