L’orgasme, une symphonie cérébrale parfaitement orchestrée

Santé

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The Conversation

L’orgasme, une symphonie cérébrale parfaitement orchestrée

Est-ce le cerveau qui contrôle l’orgasme, ou l’inverse ? Ce qui est prouvé, c’est que l’orgasme peut avoir des effets bénéfiques sur la santé. agsandrew / Shutterstock
José A. Morales García, Universidad Complutense de Madrid

« Donnez-moi la même chose qu’elle », dit Estelle Reiner au serveur en désignant Meg Ryan, qui vient de simuler un orgasme dans le restaurant où a lieu la fameuse rencontre du film Quand Harry rencontre Sally (1989). Cette célèbre scène est sans doute l’orgasme le plus connu de l’histoire du cinéma.

L’orgasme. Nous avons entendu, lu ou prononcé ce mot à de nombreuses reprises sans certainement nous arrêter pour réfléchir à sa signification. Son origine vient du mot grec orgasmos, qui dérive lui-même de orgé (« tempérament », « colère », « fureur »), et du suffixe -asmos, qui renvoie à l’idée de « résultat brusque », « coup ». L’orgasme est le point culminant intense et agréable de l’excitation sexuelle. Il se caractérise par des contractions rythmiques des muscles du plancher pelvien, accompagnées d’un plaisir intense et suivies d’un sentiment de relaxation et de satisfaction.

Le système nerveux est aux commandes

Et si nous définissions l’orgasme de manière plus technique ? Nous dirions alors qu’il s’agit de l’intensité maximale de l’excitation générée par la stimulation afférente des récepteurs sensoriels viscéraux et/ou somatiques activés de manière exogène et/ou endogène. Cette intensité est associée à l’apparition de processus cognitifs d’ordre supérieur puis elle est suivie d’un relâchement et d’une résolution (diminution) de l’excitation.

Cette définition ressemble à du charabia. Mais elle nous rapproche probablement du véritable architecte de cette symphonie d’activités neuronales : le système nerveux. L’orgasme est un événement complexe qui implique une interaction synergique entre le corps et l’esprit. Et quel meilleur chef d’orchestre que notre système nerveux pour jouer ce rôle ?

En effet, des études basées sur l’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle montrent que pour atteindre un orgasme, de multiples structures nerveuses doivent être activées, ce qui entraîne une tempête sympathique hyperactive. Il s’agit d’un état dans lequel le système nerveux sympathique – celui qui contrôle les actions involontaires du corps comme la respiration ou le rythme cardiaque – présente une activité excessive. Cette frénésie provoque des changements physiologiques dans l’organisme, tels qu’une augmentation du rythme cardiaque, de la pression artérielle ou de la respiration (qui devient plus rapide et plus profonde).

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Voici à quoi ressemble l’orchestre dirigé par le cerveau

Mais la symphonie ne s’arrête pas là. À cette réponse périphérique, s’ajoute une activation centrale impliquant plusieurs régions du cerveau. Il est temps de rencontrer ses protagonistes.

  • Le cortex sensoriel est responsable du traitement des informations tactiles et sensorielles telles que la stimulation du clitoris, du col de l’utérus ou du vagin. Pendant l’orgasme, cette région du cerveau est activée, en réponse à la stimulation agréable qu’elle reçoit.

  • Les contractions rythmiques qui caractérisent l’orgasme sont le résultat de l’activation du cortex moteur, qui est responsable de la coordination de la réponse musculaire qui accompagne l’orgasme sexuel. C’est comme si le cerveau dirigeait une succession de mouvements qui se terminent par un crescendo de plaisir.

  • Des études scientifiques ont montré que le cortex visuel est également activé. Ce qui suggère que, pendant l’orgasme, l’attention portée aux surfaces corporelles qui se trouvent stimulées ainsi qu'à l’imagerie visuelle est accrue.

  • Même si tous les instruments sont importants dans un orchestre, au niveau du cerveau, la véritable star de cette symphonie est le système limbique qui constitue le centre des émotions et de la récompense. C’est là que toute la musicalité de l’apogée sexuelle se déchaîne. L’une des principales structures limbiques impliquées est l’hypothalamus. Il coordonne la libération des hormones sexuelles et des neurotransmetteurs essentiels au processus d’excitation sexuelle et au développement de l’orgasme.

  • En suivant le rythme, l’amygdale apparaît comme un acteur de premier plan. Cette structure cérébrale est spécialisée dans le traitement des émotions, y compris celles associées à la sexualité, comme l’excitation et le plaisir. Pendant l’orgasme, l’activité de l’amygdale augmente, ce qui contribue à intensifier notre réponse émotionnelle et notre sensation de plaisir.

  • L’hippocampe, connu pour son rôle dans la mémoire et l’apprentissage, a également sa place dans cet orchestre neuronal. Il est responsable de l’encodage et de la consolidation des expériences sexuelles agréables. Cela signifie que le système limbique peut influencer la manière dont nous nous souvenons et traitons nos expériences sexuelles, y compris les orgasmes. Ces processus peuvent conditionner nos réponses émotionnelles et notre comportement sexuel futur.

  • Enfin, d’autres structures cérébrales telles que le cervelet et sa projection vers le tegmentum pontique sont impliquées dans les composantes cardiovasculaires et motrices de l’orgasme. Il a été démontré que l’activation de la région ventrolatérale du tegmentum pontique produit les contractions du plancher pelvien qui sont responsables, chez la femme, (au moins en partie) de l’orgasme physique. Chez l’homme, cette zone génère aussi des contractions du plancher pelvien responsables, cette fois, de l’éjaculation.

Un flot de neurotransmetteurs

À la fin, tout repose sur les neurotransmetteurs, ces messagers chimiques qui créent une poussée de sensations agréables qui envahissent le cerveau. Voyons leur rôle.

  • La dopamine, qui est connue comme le neurotransmetteur du plaisir et du bonheur, atteint des niveaux maximums pendant l’orgasme, ce qui génère une sensation d’extase et de récompense.

  • Souvent appelée « hormone de l’amour », l’ocytocine est également libérée en grandes quantités, ce qui favorise les liens émotionnels et l’intimité entre les partenaires sexuels. C’est comme si le cerveau était programmé pour renforcer les liens pendant cette période, favorisant ainsi une plus grande connexion entre les partenaires.

  • Pendant l’orgasme, le cerveau sécrète également de la sérotonine, une substance liée à la régulation de l’humeur et au bien-être émotionnel. Elle contribue à produire une sensation de satisfaction et de bonheur, ce qui nous amène à comprendre que l’orgasme n’est pas seulement un événement physique, mais aussi mental.

Un black-out salutaire

Dans ce contexte, l’expérience émotionnelle et phénoménologique de l’orgasme est liée à la désactivation de certaines zones du cerveau, telles que le cortex préfrontal, temporal et entorhinal. Cela est interprété comme une augmentation de la perception de l’expérience agréable et de la sensation de satiété qui accompagne l’apogée sensorielle.

À la lumière de toutes ces recherches, il n’est peut-être pas évident de déterminer si c’est le cerveau qui contrôle l’orgasme ou si c’est l’inverse. En fait, certaines études démontrent que de nombreuses zones sont désactivées au moment même où l’acte sexuel est culminant, ce qui suggère que le cerveau « s’éteint » virtuellement, à l’exception du tronc cérébral – responsable de l’activité cardiovasculaire – et du cervelet – responsable des mouvements.

Ce qui est prouvé, c’est que l’orgasme peut avoir des effets bénéfiques sur la santé : il soulage le stress, améliore l’humeur et renforce le système immunitaire. De plus, la libération d’endorphines et d’autres substances chimiques peut avoir des propriétés analgésiques et anti-inflammatoires, en soulageant la douleur et en favorisant un sentiment général de bien-être.

Après avoir lu cet article, je suis sûre que vous serez d’accord avec Estelle Reiner et que vous commanderez la même chose que Meg Ryan.

José A. Morales García, Investigador científico en enfermedades neurodegenerativas y Profesor de la Facultad de Medicina, Universidad Complutense de Madrid

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.


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