Marine Le Pen : une heure sur TF1, six intox

Politique

Bobards sur l'euro, l'islamisme, l'Europe ou les suppressions de postes de fonctionnaires : la présidente du FN a livré un joli pot-pourri, hier, sur TF1

C’est Marine Le Pen qui a ouvert le bal télévisé de la campagne du second tour sur TF1, hier. Une heure, pour dérouler son argumentaire… et ses intox. Revue détaillée.

1) Non Emmanuel Macron n’est pas entouré d’un «islamiste radical»

Face à ses intervieweurs, la présidente du FN a déclaré : «Monsieur Macron nous a expliqué qu’il avait dans son entourage un islamiste radical mais que c’était un brave type, un type bien. Bon, moi je pense qu’il n’y a pas de type bien chez les islamistes radicaux.» Marine Le Pen évoque l'«affaire Saou», qui repose sur un «off», lâché par Emmanuel Macron vendredi matin sur Beur FM. Début avril, une série de posts Facebook de Mohamed Saou, le référent d’En marche dans le Val d’Oise, sont déterrés par le site Jforum.fr et relayés par l’ex-élu socialiste Céline Pina. Dans ces messages postés sur le réseau social avant son engagement politique, le militant macroniste affiche son soutien à Recep Tayyip Erdogan lors du coup d’Etat manqué de l’été 2016, écrit qu’il n’a «jamais été et [ne sera] jamais Charlie» quand Charlie Hebdo caricature les victimes du séisme en Italie le mois suivant, et partage le contenu de plusieurs publications de Marwan Muhammad, le porte-parole du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF). En marche demande à Saou de «se mettre en retrait de ses fonctions», tout en le félicitant pour son travail de terrain. Le militant n’est pas exclu, il peut faire campagne sur le terrain, mais il n’est plus référent.

Invité le vendredi sur la radio Beur FM, Emmanuel Macron revient sur cette affaire. L’émission est retransmise en direct sur Facebook live, y compris durant les interludes musicaux et publicitaires, quand le candidat est hors antenne. Le micro ouvert, il prend la défense de Mohamed Saou : «Un citoyen et un responsable plein et entier», dont Macron «admire le travail». En off, un présentateur revient sur les débats incessants autour de Charlie Hebdo, et notamment l’affirmation de Saou : «Je ne suis pas Charlie», dans le sens «je ne suis pas obligé d’aimer», explicite le présentateur.

Macron lance alors : «Non, mais il a fait un ou deux trucs un peu plus radicaux. C’est ça qui est compliqué. Mais à côté de ça, c’est un type bien. C’est un type très bien, Mohamed. Et c’est pour ça que je ne l’ai pas viré.» Valeurs actuelles coupe cette phrase hors contexte et s’emballe : Pensant être hors antenne, Macron soutient l’islamiste sulfureux Mohamed Saou, titre le journal préféré de la droite de la droite. Depuis, les cadres du FN s’en sont donnés à cœur joie. Marine Le Pen en dernier lieu. 

2) Non, 50% des agriculteurs ne «vivent» pas avec moins de 350 euros par mois

La présidente du FN s’appuie sur des données bien réelles, mais sa présentation est trompeuse. En 2015, selon la Mutualité sociale agricole (MSA), le régime de protection sociale des agriculteurs, c’est un gros tiers des agriculteurs (38%, soit 174 000) dont les revenus réels ne dépassaient pas 350 euros, le montant à partir duquel ils peuvent demander un report de cotisations sociales. Dans une interview au Figaro, Pascal Cormery, le président de la Mutualité sociale agricole, craignait même que la proportion augmente, et que plus de la moitié des paysans imposés au régime réel déclarent des revenus inférieurs à 354 euros par mois en 2016 : «Nos inquiétudes sont particulièrement vives pour cette année car elle a été marquée par de très mauvaises récoltes cet été, les prix du lait sont au plus bas et les vendanges n’ont jamais été aussi faibles depuis trente ans, indique au Figaro Pascal Cormery. Nous ne sommes qu’au début des problèmes, plus de la moitié des exploitants risquent de déclarer des revenus inférieurs à 354 euros en 2016. Cela risque d’être très tendu et même dramatique dans certaines exploitations.»

Mais qu’entre un tiers et la moitié des agriculteurs soient dans ce cas ne signifient pas qu’ils vivent avec 350 euros comme le simplifie Le Pen. En effet, ce revenu déclaré, qui sert au calcul des cotisations «n’intègre pas les autres revenus éventuels comme les prestations sociales (Prime d'activité, RSA, logement, allocations familiales),le revenu du conjoint ou les autres revenus (capitaux…)». Selon les chiffres de la MSA, un peu moins de 30 000 foyers percevaient par exemple le RSA (431 euros de montant moyen), et 96 000 la prime d’activité (166 euros de montant moyen). Cela n’enlève rien à la situation parfois dramatique des agriculteurs, mais cela montre que confondre revenu professionnel réel et revenu global n’a pas de sens....

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