Corinne Lepage : « La question se pose de savoir si la France est encore un Etat de droit »

Politique

Alors que se tient la grande consultation nationale, les instruments mêmes du débat public sont en train d’être déconstruits ou sont programmés pour l’être, dénonce l’ancienne ministre de l’écologie dans une tribune au « Monde ».

Tribune. Nous avons été nombreux à nous réjouir, quelles que soient les faiblesses congénitales de l’organisation du grand débat, qu’une véritable réflexion impliquant le plus grand nombre de nos concitoyens puisse se mettre en place. A l’heure qu’il est, nul ne sait, sauf peut-être le président de la République, comment s’achèvera ce débat et sur quelles sortes de propositions, qu’elles soient organisationnelles ou de fond, il débouchera.

Mais le malheur veut que, « en même temps », tous les instruments du débat public soient progressivement déconstruits ou programmés pour l’être. Ainsi, nous sommes dans cette situation paradoxale dans laquelle au moment même où toute la communication publique est centrée sur le grand débat, les efforts du législateur et des acteurs du débat public en France sont en passe d’être anéantis.

Rappelons tout d’abord que la France n’est pas une île déserte et qu’elle est, jusqu’à preuve du contraire, tenue par les engagements internationaux et communautaires qu’elle a pu prendre. Parmi ceux-ci figurent les conventions d’Espoo et d’Aarhus, lesquelles protègent précisément les droits des citoyens à l’information, à la participation et à l’accès à un juge. De plus, de nombreuses directives communautaires exigent la participation du public, et mieux encore – hérésie pour la haute administration française – la prise en compte de cet avis.

Or, une série de décisions ou de projets, qui n’ont pas passé les radars du grand public et notamment des « gilets jaunes », viennent précisément anéantir ce qui avait pu être construit depuis vingt-cinq ans.

Envolées lyriques

Tout d’abord, la suppression programmée des enquêtes publiques. Certes, celles-ci sont très contestées dans la mesure où les commissaires-enquêteurs, généralement issus du monde de l’équipement, semblent trop fréquemment enclins à écouter les sirènes d’un développement de court terme et d’emploi bien souvent virtuel plutôt que les préoccupations des personnes vivant sur place, soucieuses de protéger leur patrimoine collectif. Dès lors, alors que cette critique aurait dû conduire à ouvrir le champ des enquêtes publiques pour mieux intégrer, comme l’exige le droit communautaire, les avis du public, le gouvernement a fait le choix de supprimer purement et simplement les enquêtes publiques pour les réduire à une consultation par Internet qui n’a évidemment rien à voir et qui ne permet aucun contact direct entre les maîtres d’ouvrage et les habitants. Voilà une source de débats et de consultation qui disparaît corps et biens.


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