On a découvert la limite absolue à l'endurance humaine

Santé

Le corps humain ne peut pas brûler plus d'un certain nombre de calories par jour, ce qui signifie que les capacités humaines ont un plafond infranchissable, rapporte une nouvelle étude. Un plafond lié au métabolisme qui expliquerait également... la durée de la grossesse.

 

Nous nous sommes habitués à voir les records du monde tomber lors des compétitions sportives comme les Jeux Olympiques ou les Championnats du monde d'athlétisme. De nombreux scientifiques se sont interrogés sur la limite infranchissable que ne pourrait pas dépasser le corps humain. On observe ainsi que le nombre de records sportifs est en chute libre depuis les années 1990. « Au saut à la perche par exemple, on est passé très vite de la barre des 5 m (en 1963) aux 6,14 m de Sergueï Bubka en 1994. Mais il a fallu vingt ans pour battre ce record grâce au Français Renaud Lavillenie, en 2014 », rapporte Jean-François Toussaint, professeur de physiologie de l'université Paris-Descartes. Pour autant, on n'a jamais pu établir de manière formelle une limite théorique.

Le corps ne peut pas assimiler plus de 4.000 calories par jour

C'est ce que vient pourtant de découvrir une équipe de chercheurs de l'université de Duke en Californie. Dans une étude parue dans Science Advances le 5 juin, ces derniers ont établi que même les meilleurs athlètes du monde ne peuvent pas franchir une certaine capacité d'endurance sur le long terme. D'après leurs calculs, la dépense énergétique totale (DET) ne peut pas excéder 2,5 fois la dépense métabolique de base (DMB), soit environ 4.000 calories par jour pour un individu de corpulence normale.

De précédentes études avaient pourtant estimé ce plafond à un seuil beaucoup plus haut : 4 à 5 fois la DMB pour les 23 jours du Tour de France, 9,4 fois pour un triathlon de 11 heures, 8,5 fois pour un ultramarathon de 25 heures ou encore 6,6 fois pour un trek arctique de 10 jours. Mais pour parvenir à cette performance, le corps puise dans ses réserves et « s'autoconsume » même si on lui fournit des calories supplémentaires, rapporte Herman Pontzer, anthropologiste à l'université de Duke et coauteur de l'étude. À long terme, la dépense est donc insoutenable.

Une dépense énergétique en courbe logarithmique

Pour parvenir au chiffre de 2,5, les chercheurs ont compilé les résultats des précédentes études et ajouté leurs propres données issues d'une course de 140 jours à travers les États-Unis (transcontinental Race Across the USA, ou Rausa), et, plus étonnant, de la grossesse et de l'allaitement, « une sorte d'activité d'endurance ultime », sourit Herman Pontzer. Ils en ont tiré une courbe logarithmique déclinante tendant vers 2,5 : lors d'un 100 mètres, on peut naturellement brûler les calories à un rythme très élevé, mais vous n'arriverez pas à courir un marathon à cette vitesse. Durant le Tour de France, les cyclistes peuvent ainsi consommer 7.000 à 8.000 calories par jour, mais au bout d'un moment, le corps n'arrive plus à assimiler ces calories supplémentaires. « Il s'agit en réalité moins d'une limite à l'effort que d'une limite à la capacité de digestion », explique Herman Pontzer.

La dépense énergétique totale (DET ou BMR en anglais) suit une courbe logarithmique et tend vers la barre de 2,5 fois la dépense métabolique de base (DMB). © Caitlin Thurber et al, Science Advances, 2019

La dépense énergétique totale (DET ou BMR en anglais) suit une courbe logarithmique et tend vers la barre de 2,5 fois la dépense métabolique de base (DMB). © Caitlin Thurber et al, Science Advances, 2019


Le corps dispose cependant d'une incroyable capacité d'adaptation. Durant les cinq premiers jours de la course transamérique, les athlètes dépensent en moyenne 6.202 calories par jour soit 3,76 fois la DMB. Mais lors de la dernière semaine, alors que le rythme de la course est quasi inchangé, la dépense énergétique chute à 4.906 calories par jour, soit 2,81 fois la DMB. Le corps apprend ainsi à « économiser » l'énergie. Mais cette capacité d’économie atteint donc une limite fatidique de 2,5.

La grossesse, ultime course d’endurance ?

Autre découverte étonnante : la dépense énergétique durant la grossesse s'établit à 2,2 fois la DMB, soit à peine au-dessous de celle des athlètes lors d'un trek d'endurance. « Cela expliquerait pourquoi les bébés ne peuvent pas grossir plus et pourquoi la grossesse dure aussi longtemps », indiquent les chercheurs. Dépasser le seuil de 2,5 signifierait pour la mère puiser dans ses propres réserves, ce qui serait dangereux pour sa survie. « La question est : ce taux de 2,5 semblant réguler l'ensemble du métabolisme est-il la cause ou la conséquence de la durée de la grossesse ? », s'interroge Herman Pontzer.

Ce qu'il faut retenir
  • Sur le long terme, l’Homme ne peut pas dépenser plus de 2,5 fois son métabolisme de base soit environ 4.000 calories par jour.
  • Le corps peut s’adapter au bout de quelques jours en réduisant ses besoins, mais ne peut pas franchir un certain seuil.
  • Cette limite semble s’appliquer à n’importe quelle dépense métabolique, y compris la grossesse et l’allaitement.

Source : On a découvert la limite absolue à l'endurance humaine


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