Jean-François Colosimo, éditeur des jeunes conservateurs

Politique

PORTRAIT | Directeur des éditions du Cerf depuis 2013, Jean-François Colosimo a transformé la vieille maison dominicaine en vivier de la jeune garde conservatrice. Malgré sa proximité avec Patrick Buisson, il refuse les étiquettes politiques.

Jean-François Colosimo a sa tête des mauvais jours. Il n’est pas franchement ravi d’apprendre que nous préparons son portrait. Le patron des éditions du Cerf, 58 ans, n’est pas encore assis qu’il ronchonne déjà, une clope glissée entre ses lèvres serrées. « Je vais vous dire comment ça va se passer, mademoiselle. »

Nous sommes en terrasse du Select, célèbre brasserie du boulevard du Montparnasse, à Paris. Le quartier des éditeurs. Pull noir, pantalon noir – sa couleur fétiche –, Jean-François Colosimo a les yeux rivés sur notre cahier de notes. Il ponctue ses phrases d’un autoritaire « Vous comprenez ? Vous saisissez ? » Quand il ne tripote pas les deux briquets posés sur la table, il pointe ses doigts vers nous d’un air menaçant.

Un vernis romanesque et une teinte de mystère

Si l’éditeur a le regard noir d’inquiétude derrière ses lunettes rondes, c’est parce qu’il y aurait, selon lui, « beaucoup de fantasmes sur [s]a personne ». Sur ce point, il a raison. Avec le temps, le fils de Calabrais a donné à son personnage un vernis romanesque et une teinte de mystère. Président du puissant Centre national du livre (CNL) sous Nicolas Sarkozy, éditeur chevronné, catholique converti à l’orthodoxie… Il est connu aujourd’hui comme l’éditeur d’une génération, celle des nouveaux conservateurs.

Eugénie Bastié, Mathieu Bock-Côté, Alexandre Devecchio, Laetitia Strauch-Bonart… Tous lui doivent d’occuper les devantures des librairies avec leurs livres, de vrais sésames pour plateaux de télévision. Il est aussi le premier laïc à diriger cette maison d’édition religieuse qu’est le Cerf, propriété des frères dominicains. À droite comme à gauche, Jean-François Colosimo accumule contempteurs et admirateurs : ceux qui voient en lui « un parfait opportuniste d’extrême droite », telle Aurélie Filippetti, et ceux qui encensent « l’esprit le plus fort et le plus structuré » qu’ils connaissent, comme Régis Debray.

Eugénie Bastié appartient à la seconde catégorie. À 27 ans, la chroniqueuse star du Figaro est le nouveau visage de la droite réac : yeux bleus perçants, cheveux de jais et mâchoire carrée, présente sur toutes les chaînes d’info en continu. Son succès, elle le doit presque entièrement à cet homme assez fou ou confiant pour faire signer un contrat d’édition à celle qui était, en 2014, une simple stagiaire du FigaroVox, le très droitier site de débat du quotidien conservateur. Elle veut alors écrire un pamphlet et dénoncer « la misère du néoféminisme contemporain », les « ayatolettes » de l’égalité et la fin de la galanterie. Lui souhaite développer une branche « débats » au Cerf.


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